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Records battus pour les enchères de New York, la rareté toujours recherchée

Près de trois milliards de dollars d’œuvres d'art vendues en deux semaines, les enchères de printemps à New York ont battu des records et démontré que l'appétit pour toiles et sculptures majeures est plus fort que jamais.

Quelque 1,79 milliard de dollars pour Christie's et 859 millions pour Sotheby's, le millésime new-yorkais se situe au-delà du printemps 2015, longtemps considéré comme un moment de lévitation hors du temps, suivi par un ralentissement marqué lors des saisons suivantes.

"C'est colossal", estime Georgina Adam, auteure de "Dark Side of the Boom", sur le marché de l'art au XXIe siècle, même si la saison a duré deux semaines au lieu d'une pour absorber la monumentale collection Rockefeller. "C'est vraiment énorme, surtout après le creux de 2016."

Pas de record absolu cette année, le "Salvator Mundi" de Léonard de Vinci, adjugé en novembre 2017 pour 450,3 millions de dollars à New York, ayant mis la barre très haut. Mais des dizaines d'artistes ont dépassé leur prix le plus élevé et plus de 250 œuvres ont dépassé le million de dollars.

"Il y a toujours suffisamment de gens désireux d'acheter à des prix élevés si c'est la crème de la crème du marché de l'art", observe Rachel Pownall, professeure à l'université néerlandaise de Maastricht.

En 2017, le marché des enchères s'est redressé, à 18,9 milliards de dollars contre 16,9 en 2016 mais est resté nettement en retrait de la folle année 2015 et ses 21,1 milliards de dollars, selon des études réalisées pour l'organisation spécialisée TEFAF.

Mais le chiffre global masque des disparités, souligne Rachel Pownall, avec un marché pour les œuvres les plus onéreuses qui affiche une croissance supérieure au reste des enchères.

"Ce dont nous manquons, en réalité, c'est de grandes œuvres d'art à vendre" et non d'acheteurs, estime Simon Shaw, co-responsable de l'impressionnisme et de l'art moderne chez Sotheby's.

- A la chasse au trophée -

Pour autant, tout ne se vend pas, loin de là, et depuis le ralentissement de 2016, les maisons d'enchères ont revu leur approche.

"Nous devons être prudents", fait valoir Jean-Paul Engelen, responsable du XXe siècle et de l'art contemporain chez Phillips, maison d'enchères qui a également organisé des ventes à New York cette semaine.

"Nous nous forçons souvent à être sélectifs mais c'est la seule voie possible", dit-il.

Malgré des prix élevés - un "Nu couché" de Modigliani à 157,2 millions de dollars chez Sotheby's et la "Fillette à la corbeille fleurie" de Picasso à 115 millions chez Christie's - il n'y a pas eu d'accès de fièvre durant ces deux semaines d'enchères.

Beaucoup de lots ont été adjugés après deux ou trois surenchères seulement.

Outre la sélection, la promotion et le marketing sont également essentiels désormais à une saison réussie, comme l'a montré l'opération "Salvator Mundi".

Les maisons d'enchères font voyager les œuvres dans le monde durant les mois précédents la vente, pour créer l'événement.

Pour Sara Friedlander, en charge de l'Après-Guerre et de l'art contemporain pour Christie's à New York, "nos clients sont réactifs à des choses qui sont totalement nouvelles sur le marché", souvent sorties de collections privées où elles ont passé des décennies.

"L'acheteur, aujourd'hui, est mieux informé que jamais", explique M. Engelen, "parce que nous sommes dans l'ère de l'information."

"Les gens qui dépensent des sommes importantes" sur des œuvres d'art "ne sont généralement pas devenus riches en étant stupides", dit-il. "Ils s'informent."

On se retrouve avec des gens "très, très riches", désireux de se différencier, "qui se battent pour quelques trophées", explique Georgina Adam.

Dernier exemple en date, le rappeur et producteur Sean "Diddy" Combs, qui a dépensé 21,1 millions de dollars mercredi pour s'offrir un tableau du peintre afro-américain Kerry James Marshall chez Sotheby's.

Nouveauté, la demande n'est plus cantonnée à une poignée d'artistes ultra-célèbres mais s'élargit à des peintres ou sculpteurs moins connus.

C'est le résultat d'un marché désormais mondialisé, moins concentré sur quelques fortunes blanches. "S'il y a davantage de diversité chez les acheteurs", dit Rachel Pownall, "ils vont aussi chercher plus de diversité dans ce qu'ils achètent."

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