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Parité dans le cinéma: la France dit "action !"

Près d'un an après le déclenchement de l'affaire Weinstein, la France passe à l'action avec la création d'un bonus pour promouvoir la parité hommes-femmes dans le cinéma et "ne pas laisser retomber la vague".

Alors que les réalisatrices dans l'Hexagone sont payées 42% de moins que leurs confrères masculins, la ministre de la Culture a annoncé jeudi la mise en place l'an prochain d'un bonus de 15% dans les subventions pour les films jugés "exemplaires en matière de parité".

"Je crois aux incitations financières", a lancé Françoise Nyssen en clôture des Assises de la parité organisées depuis mardi à Paris.

Ce bonus financier pourra être attribué aux films dont les équipes ont des femmes à des postes-clés (réalisation, direction de production, direction de la photo, etc), soit "moins d'un film sur six" à l'heure actuelle. Il a vocation à disparaître "lorsque la parité sera installée".

"C’est le rôle du cinéma de susciter une prise de conscience et de faire évoluer les mentalités", a estimé Frédérique Bredin, présidente du CNC, organisme qui s'est notamment engagé à rendre obligatoire les statistiques de genre dans les dossiers d’agrément des films et à veiller à la mise en valeur des oeuvres de patrimoine réalisées par des femmes.

Autant de mesures pour briser le "plafond de verre" dans le 7e art, mis en lumière avec l'affaire Weinstein qui a fait l'effet d'un détonateur.

La situation en Europe est contrastée, avec des politiques à destination des réalisatrices mises en place dans la plupart des pays du nord, contrairement à ceux du sud, relève l'étude annuelle Le Lab-Femmes de cinéma publiée mi-septembre, à partir de données de 1.462 films dans 30 pays. Pays le plus à la pointe, la Suède a vu la part de réalisatrices passer de 16,7% en 2012 à 36,1% en 2017.

- Budget à la traîne -

En France, premier producteur de films en Europe, environ un film sur quatre est réalisé par une femme, selon l'étude. Côté budget, les productions des hommes sont environ deux fois plus importantes que celles des femmes (5,36 millions d'euros pour les films de réalisateurs, 2,84 millions pour les réalisatrices en moyenne).

"Une réalisatrice a souvent moins d'argent, des choix limités dans les genres cinématographiques et des difficultés à passer au deuxième film", expliquait récemment à l'AFP l'universitaire Brigitte Rollet, spécialiste de ces questions.

Les inégalités de traitement sont également criantes pour les métiers techniques, où les femmes sont peu représentées.

Pour les comédiens, on négocie encore "le salaire de l'acteur principal et après celui de l'actrice principale", a déclaré jeudi l'agent Elisabeth Tanner. "La femme sert de variable d'ajustement."

Quant aux actrices françaises avec des salaires supérieurs à 1 million d'euros, ce sont celles qui ont une reconnaissance "à l'international", a-t-elle souligné. Une logique financière qui ne s'applique pas aux acteurs français.

La tenue des "assises sur la parité, l'Egalité et la diversité" avait été annoncée pendant le dernier Festival de Cannes, très engagé sur la question des femmes, avec une montée des marches 100% féminine pour réclamer l'égalité salariale.

Cannes et par la suite d'autres festivals (Locarno, Venise, Toronto...) s'étaient engagés à faire plus, en signant une charte rendant transparente la liste des membres des comités de sélection.

"Une première victoire", a salué jeudi la réalisatrice Céline Sciamma, du collectif 50/50/2020, pour la parité dans le cinéma à horizon 2020.

En revanche, cette charte n'impose pas de quotas en sélection pour les films réalisés par des femmes. Une situation dont s'est récemment ému le cinéaste Jacques Audiard, présent cette semaine aux assises.

Ainsi, sur les 21 films en compétition à la Mostra de Venise, un seul était réalisé par une femme. "L'égalité, ça se compte. La justice, ça s'applique. C'est très simple", avait-il lancé à Venise.

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