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République démocratique du Congo: un groupe rebelle armé sème la terreur, "ils m'ont pourchassée en me découpant"

Plus de 110 civils ont été tués dans la région frontalière de l'Ouganda, à l'est de la République démocratique du Congo depuis le 5 novembre, selon un bilan établi par l'AFP à partir de diverses sources locales. Les blessés affluent à l'hôpital général de Beni.

"Ils m'ont demandé de m'asseoir pour qu'ils me découpent à la machette": Kavuho Ndovya a survécu à un massacre de civils attribués au groupe armé des Forces démocratiques alliées (ADF) qui sème la terreur à Beni dans l'est de la République démocratique du Congo. Une soixantaine de rescapés sont pris en charge à l'hôpital général de Beni, lourdement blessés et traumatisés.

La plupart d'entre eux ont été touchés aux jambes par balles "parce qu'ils ont été atteints dans leur fuite", témoigne le Dr Godefroid Kombi, chirurgien en chef à l'hôpital de Beni. "Ceux qui n'avaient pas tenté de s'enfuir, comme moi, ont été taillés en morceaux, comme mes parent", explique Edwige Kalivanda, orpheline de 9 ans.


©AFP

La petite fille a été touchée par balles aux deux jambes alors qu'elle fuyait une attaque à Rwangoma, un quartier de Beni-ville. Dans le pavillon des blessés, une mère de cinq enfants, Kavuho Ndovya, porte les cicatrices de "neuf blessures profondes", selon le Dr Kombi.

"J'ai fait le mort"

"Les ADF m'ont demandé de m'asseoir pour qu'ils me découpent à la machette. J'ai tenté de fuir mais ils m'ont pourchassée en me découpant", raconte la mère de famille. Elle a survécu à l'attaque du 19 novembre à Mbau, à 26 km au nord de Beni, à l'entrée du "triangle de la mort" Mbau-Eringeti-Oicha.

"Je suis tombée une première fois, ils m'ont taillée avec leurs machettes. Je me suis enfuie une deuxième fois, ils ont tiré. J'ai fait le mort", raconte-t-elle à un journaliste de l'AFP. "Si je n'avais pas tenté de fuir ou fait le mort, je suis certaine que je ne serais plus en vie. Ils n'ont pas touché à mes enfants qui étaient témoins de cette scène insupportable", précise-t-elle, le regard perdu, avec à peine assez de force pour parler.


©AFP

A côté, une fillette de 12 ans, Kavira Kivua, est dans le coma, un bandage autour de la tête. "C'est à l'intérieur de notre maison à Oicha que ma fille a reçu une balle qui a traversé sa bouche de part en part, lors d'une attaque", explique, désespérée, sa maman Kyakimua Mbene.

Tués à la machette

Les ADF, à l'origine un mouvement rebelle musulman ougandais, sont implantés dans l'est de la RDC, où ils ont fait souche, depuis près de 25 ans. Ils y attaquent les civils dans des zones reculées, souvent inaccessibles aux forces de sécurité. Accusés d'avoir tué 1.000 civils depuis octobre 2014, les ADF ont intensifié leurs attaques après l'annonce d'opérations militaires contre leurs bases le 30 octobre. Des "représailles" pour briser le soutien des civils à l'armée, d'après les observateurs.

"Ils m'ont demandé si je savais où étaient les militaires, si je collaborais avec les militaires. Avant même de répondre, ils ont tiré sur moi et sont partis", raconte Kavira Mahiha, une rescapée atteinte par une balle à la cheville. Elle a survécu au raid contre Mbau du 16 novembre le long de la RN4. "Le bilan de l'attaque était de 15 personnes tuées à la machette". Elle a accepté de garder le petit Kambale Mbumba, âgé d'un an et demi, l'enfant de sa voisine tuée par les ADF ainsi que son mari et trois autres frères de cet enfant. "De sa famille, Kambale est l'unique survivant", témoigne-t-elle.


©AFP

Dans ces violences, des cas de règlement de compte sont également signalés. "Quelques minutes seulement après une attaque de notre cité (Mbau) par les ADF le 16 novembre, c'est notre voisin, un militaire de notre propre armée, qui avait tiré sur moi, me blessant à la jambe", accuse Kavuo Mbafumoja, une habitante de Mbau. Sa jambe droite est prise dans un plâtre.

Crânes fracassés, enfant décapité, tête décapitée mise à cuire dans une marmite: sur Twitter, les internautes diffusent depuis plusieurs jours des images des pires atrocités attribuées aux ADF, ce groupe qui continue à tuer, comme dit un expert, "dans le silence de la nuit".

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