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Jean-Luc Coatalem lauréat du prix Jean Giono

Finaliste malheureux des prix Goncourt et Renaudot, Jean-Luc Coatalem a reçu mercredi le prix Jean Giono pour "La part du fils", récit dans lequel l'écrivain mène une enquête sur la disparition de son grand-père mort dans un camp de concentration.

Décerné chaque année "au meilleur +raconteur d’histoires+, il récompense un ouvrage en français laissant une large place à l’imagination". Doté de 10.000 euros, il est parrainé par la Fondation Jan Michalski.

Contrairement à ses précédents récits d'aventures ("Je suis dans les mers du sud", Grasset, 2001, prix des Deux-Magots, où il partait à la recherche de Paul Gauguin ou de "Mes pas vont ailleurs", Stock, 2017, prix Femina essai, sur les traces de Victor Segalen), "La part du fils" (Stock) est un texte plus intime.

Jean-Luc Coatalem a cherché dans ce livre à lever le voile sur un lourd secret de famille: l'arrestation par la Gestapo en 1943 à Brest de son grand-père Paol que l'écrivain-voyageur, né en 1959, n'a pas connu mais dont le souvenir n'a jamais cessé de le hanter.

Les fils de Paol, Ronan et Pierre, respectivement oncle et père de Jean-Luc Coatalem, ont catégoriquement gardé le silence sur la disparition de leur père. Ils sont allés jusqu'à interdire à Jean-Luc Coatalem de parler de cette affaire en public. Le malheur n'est pas un sujet.

Est-ce pour cela que le récit (272 pages, 19 euros) est présenté comme un roman? Le but revendiqué de l'écrivain était de raconter "le destin de mon grand-père, des siens, des nôtres".

Parler de l'obstination des Bretons est un cliché bien sûr. Mais Jean-Luc Coatalem s'est accroché à cette histoire jusqu'à réussir à démêler les fils d'un écheveau semblant inextricable.

Paol a été dénoncé comme résistant par un voisin. Déporté à Buchenwald, il servira d'esclave dans les souterrains du camp de Dora où étaient fabriqués les V2 qui ont terrorisé Londres à la fin de la guerre.

L'ingénieur qui avait conçu ces engins de mort s'appelait Wernher von Braun. Récupéré par les Américains, l'ex-nazi mit sur pied le programme spatial américain.

Il y a des pages poignantes quand Jean-Luc Coatalem découvrant le destin tragique de son grand-père se souvient de cette nuit d'été 1969 où son père le réveilla vers 4H00 du matin pour regarder à la télé le premier homme fouler le sol lunaire.

L'ex-bourreau était devenu un héros, sa victime un mort anonyme.

Arrivé au bout de sa quête, Jean-Luc Coatalem a adressé à sa famille le dossier de ses recherches. Sortant de son silence, son père lui adressera en retour un courrier récapitulant tout ce qu'il savait sur Paol. Jean-Luc Coatalem n'a pas trahi les siens, il est devenu leur mémoire.

L'an dernier, le prix Jean Giono avait été attribué à Paul Greveillac pour "Maîtres et esclaves" (Gallimard).

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