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La gauche latino-américaine boude le Sommet ibéro-américain

Les chefs d'Etat de la gauche bolivarienne latino-américaine, à l'exception du président bolivien Evo Morales, ont boudé l'édition 2018 du Sommet ibéro-américain d'Antigua (Guatemala) qui s'est déroulé vendredi sur fond de crise migratoire aiguë sur le continent.

A l'ouverture du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement, le président guatémaltèque Jimmy Morales a lancé un appel à redoubler d'effort pour le développement du continent, alors que l'Amérique latine est secouée par une crise migratoire massive motivée notamment par la misère.

Ces grands-messes diplomatiques, créées à l'initiative de la monarchie espagnole, l'ancienne puissance coloniale, sont surtout l'occasion pour les dirigeants latino-américains de se rencontrer, mais cette année les échanges entre conservateurs et gauche bolivarienne seront des plus réduits.

Les présidents cubain Miguel Diaz-Canel et vénézuélien Nicolas Maduro ont ostensiblement boudé le Sommet de cette année, et le chef de l'Etat nicaraguayen, Daniel Ortega, a déclaré forfait vendredi, au dernier moment.

Daniel Ortega, en butte depuis plus de six mois à des manifestations dans son pays réclamant son départ, a annulé sa venue vendredi matin.

Une douzaine d'opposants au président Ortega s'étaient rassemblés jeudi à l'entrée du secteur sécurisé pour protester contre sa participation à ce sommet réunissant des délégations de 19 pays d'Amérique latine avec l'Espagne, le Portugal et l'Andorre.

Une nouvelle manifestation a eu lieu vendredi à la mi-journée pour réclamer la libération des prisonniers politiques au Nicaragua, où les violences politiques ont fait plus de 130 morts depuis avril, la grande majorité dans les rangs de l'opposition.

Seul chef d'Etat de l'Alliance bolivarienne (ALBA, gauche) à avoir fait le déplacement à Antigua, le Bolivien Evo Morales a été fait jeudi Docteur honoris causa de l'Université San Carlos de Guatemala, en présence de la dirigeante indigène guatémaltèque et Prix Nobel de la paix Rigoberta Menchu.

- Exode -

Le 26e Sommet ibéro-américain a réuni vendredi le roi d'Espagne Felipe VI avec 14 présidents ou chefs de gouvernement, trois vice-présidents, trois ministres des Affaires étrangères et une ministre dans la ville coloniale d'Antigua alors que des milliers de personnes, sur tout le continent, fuient la misère et la violence criminelle ou politique dans leur pays.

Le président du Honduras Juan Orlando Hernandez, d'où sont parties les premières "caravanes" massives de migrants en quête du rêve américain a lancé "un appel international urgent" à l'aide de l'ONU, car "aucun Etat ne peut, tout seul, faire face à un (défi) si complexe et multifactoriel", a-t-il estimé.

Il a par ailleurs affirmé que l'organisation de "caravanes" de migrants au Honduras est organisée par "des politiques sans scrupules", et a réclamé que ceux qui seraient trouvés coupables de cette "manipulation mesquine" puissent être trainés devant les tribunaux.

Des milliers de Salvadoriens, Honduriens et Guatémaltèques se sont lancés depuis la mi-octobre sur les routes avec l'objectif d'atteindre les Etats-Unis et une vie meilleure.

Des Nicaraguayens fuyant les violences politiques dans leur pays se sont joints à l'exode, plutôt que de se réfugier au Costa Rica voisin comme des dizaines de milliers de leurs compatriotes.

Plus au sud, selon l'ONU, au moins 2,3 millions de personnes ont fui depuis 2015 le Venezuela du président Nicolas Maduro, en proie à une profonde crise économique et sociale.

Le président costaricien Carlos Alvarado a durement critiqué ces deux pays piliers de l'ALBA. Se déclarant "inquiet au plus haut point", le président Alvarado a regretté que l'idée du dialogue au Nicaragua "ne résonne que dans les coeurs de ceux qui pleurent aujourd'hui (en demandant) une société juste et égalitaire pour atteindre ainsi la démocratie".

Le président costaricien a également dénoncé "le mépris de l'Etat de droit au Vénézuéla (...) et les violations répétées des droits de l'homme", en appelant à une "solution pacifique et négociée" de la "grave crise politique, économique, social et humanitaire" qui frappe le pays.

Le vice-ministre nicaraguayen des Affaires étrangères Denis Moncada a vivement répliqué en estimant que le chef de l'Etat du Costa Rica, confronté à une longue grève du secteur public contre un projet de réforme fiscale, devrait d'abord balayer devant sa porte.

"La permanence au pouvoir de régimes autoritaires, qui laissent peu d'espace au développement d'une culture démocratique" en Amérique latine sont, avec la misère et le chômage, une autre "cause des migrations", relève le politologue Erick Maldonado, consulté par l'AFP.

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