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Vincent s'insurge contre des chasseurs à Éghezée: "J’ai des plombs dans mon jardin"

Les activités des chasseurs sur un terrain privé de la commune d’Éghezée, inquiète des riverains de la rue des Ruisseaux. Vincent, qui a contacté notre rédaction, fustige la proximité avec son habitation et un Ravel. Il a plusieurs fois constaté des traces de plombs dans son jardin ainsi que dans ses corniches. La commune, par l'intermédiaire de son bourgmestre, a décidé de prendre les choses en mains.

Chez Vincent, un habitant de la rue des Ruisseaux à Eghezée, dans la province de Namur, la chasse est un sujet de discussion qui revient très régulièrement sur la table.

Depuis huit ans, il voit débarquer des chasseurs, plusieurs dimanches par an, dans les prairies situées derrière son jardin et il observe leurs agissements avec une certaine inquiétude et une bonne dose de nervosité. Celle-ci ne serait dénuée de fondement. En décembre dernier, l'homme dit avoir retrouvé des plombs dans ses corniches et le cadavre d'un renard au fond de son jardin.

Vincent a appelé la police à de nombreuses reprises. Il a également contacté la commune par mail. Mais, selon lui, les autorités ne prennent pas la situation au sérieux. Or pour l'Éghezéen, il est urgent d'agir pour sa sécurité et celle des voisins. Il nous a dès lors informés via le bouton orange Alertez-nous.

"Les chasseurs exercent leur activité sur un terrain privé, mais ils ne respectent pas les règles en étant à moins de 20 mètres d’un Ravel, et à moins de 50 mètres des maisons alors que la loi exige 200 mètres minimum", tonne-t-il. Il est vrai que la configuration des lieux, visible sur la carte ci-dessous, semble au premier regard peu propice à la chasse.


Les points blancs indiquent les endroits où se positionnent les chasseurs ©Google Maps


"J’ai déjà vu une personne âgée courir et rentrer chez elle"

Les chasseurs se positionneraient autour d'une lignée d’arbre avec "les armes pointées vers le Ravel ou vers les maisons", assure l'alerteur. 

"J’ai des plombs dans mon jardin et je suis persuadé que ça doit aller vers le Ravel aussi parce que c’est encore plus proche que de chez moi. Le Ravel est emprunté tous les jours. Je promène mon chien deux fois par jour et je croise plein de gens. C’est un sujet de conversation durant la période de chasse. C’est dangereux", fustige Vincent. "J’ai déjà vu une personne âgée courir et rentrer chez elle car elle avait peur. Cela n’inspire pas confiance quand on les voit à moins de 20 mètres de chez soi en train de chasser. Ils ne font pas attention. L’année passée, un d’entre eux avait pointé mon chat."

La police n'aurait pas encore pu constater cette situation "préoccupante". "J’ai déjà appelé la police mais le dimanche, ils ne peuvent pas se déplacer facilement car ils sont en sous-effectif dans une grande zone", ajoute-t-il. "Quand ils arrivent, il est souvent trop tard."

Aux abords de cette rue devenue "semi-urbaine" au fil des ans, Vincent estime que la pratique de la chasse n'a tout simplement plus lieu d'être pour des raisons "évidentes".

C’est devenu une zone semi-urbaine. Peu importe où ils se mettent, ils auront une maison à proximité

"C’est devenu un peu bête d’accepter la chasse sur ces terrains-ci car dans ma rue, en 7 ans, il y a 12 maisons, qui ont été construites sur le bord du champ. Je veux bien qu’on ait donné des accords de chasse, et qu’il y avait peut-être un intérêt de réguler les populations d’animaux, mais maintenant avec toutes les maisons, c’est devenu une zone semi-urbaine. Peu importe où ils se mettent, ils auront une maison à proximité. Il n’y a plus d’animaux. Je n’ai plus de faisans ou de lapins dans mon jardin. A part un renard qui passe de temps en temps…", poursuit-il. "Peut-être que dans les Ardennes, la chasse a encore un intérêt mais ici, c’est du loisir, ce n’est pas de la régulation."
 
 
Photos prises depuis le Ravel ©D.R.


"Tout territoire est potentiellement chassable"

L'endroit où tirent les chasseurs mentionné par Vincent est un domaine privé.

Pascal Lemaire, responsable de ce cantonnement à Namur pour le DNF, rappelle que "tout territoire est potentiellement chassable pour autant que la loi sur la chasse soit respectée (détention d'un permis, superficie minimale du territoire, respect des dates d'ouverture de la chasse, autorisation du propriétaire, interdiction de tirer vers une habitation,...). Le DNF ne "reconnait pas" de territoires et il n'existe pas de zones spécifiquement désignées pour la pratique de la chasse. Si un propriétaire décide de céder son droit de chasse, il s'agit d'un accord privé. Le DNF n'est pas obligatoirement informé surtout s'il s'agit de plaines agricoles." 

Dans tous les cas, le chasseur reste "responsable de ses tirs" et "de la sécurité lors des actions de chasse". "Les dégradations survenues au domicile peuvent être signalées à la Police. Le DNF n'est pas compétent en la matière, nous sortons des prescrits de la loi sur la chasse. Selon moi, il peut s'agir dans le cas évoqué d'un problème de trouble de voisinage plutôt que d'un problème lié à la pratique de la chasse."

Les zones de chasse proches des habitations ne représentent par ailleurs pas forcément un danger. "La distance minimum par rapport aux habitations est de 200 mètres", nous expliquait déjà en 2016 Jean-Sébastien Sieux, de la direction du Département de la Nature et des Forêts (DNF), lié au Service Public Wallonie (SPW). Mais il précisait aussi que c'était 200 mètres "en direction des maisons". Si on est dos à ces maisons, même à 20 mètres, on peut donc tirer, tant que c'est dans la direction opposée.

Contacté par nos soins, Rudy Delhaise, le bourgmestre d'Éghezée, indique qu'avant le début de l'année 2019, il n'avait jamais été mis au courant de cette situation. "Ce sont des domaines privés, et s’il y a un gros souci, c’est la police qui peut intervenir. Les habitants peuvent venir me trouver et on ira voir sur place s’il le faut", dit-il. "Au niveau de la chasse, ce n’est pas la commune qui règle cela. C’est auprès de la Région, à la DNF (Département de la Nature et des Forêts) que ça se passe."


"Les chasseurs ont le droit être là"

Vincent a finalement rencontré le bourgmestre début janvier pour lui soumettre ses préoccupations. Ce dernier a fait le point sur la situation. "On a vérifié si les propriétaires avaient bien donné les autorisations pour chasser sur ces terrains privés. Ce qui est le cas", assure-t-il.

Une réunion regroupant le DNF, les propriétaires et les chasseurs, devrait avoir lieu dans les prochaines semaines. "Il faut réunir les propriétaires et les personnes qui ont le droit de chasse afin de mettre bien au courant les chasseurs de leurs obligations pour mettre fin à cette situation qui peut parfois paraître un peu litigieuse. Il y a des règles à suivre. Pour le Ravel, il faudra bien informer les citoyens qu’il y aura des périodes de chasse, etc…" ajoute-t-il. "Il faut donc que je reçoive encore le feedback de la réunion. Les chasseurs ont le droit être là. La commune ne doit pas placer de pancartes pour signaler. J’ai pris mes responsabilités en présentant au DNF les plaintes qui avaient été introduites", conclut-il.

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