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Les chercheurs belges n'ont plus les moyens de travailler sur le réchauffement climatique? Jean-Louis Tison déplore un financement "assassiné"

De retour de la station internationale Princess Elisabeth, Jean-Louis Tison, chercheur à l'ULB, était sur le plateau du RTLINFO 13H pour répondre aux questions d'Olivier Schoonejans. Une intervention d'Alain Hubert a ponctué cet entretien.

Qu'avez-vous fait à la station internationale Princess Elisabeth ?

On a fait des carottages dans la glace. Notre but est de comprendre la contribution de l'Antarctique au relèvement du niveau marin. Pour faire ça, il faut comprendre quelle a été l'évolution des précipitations neigeuses au cours du temps. Avec un carottage glacier, vous remontez dans le temps. Avec 300 mètres vous remontez jusqu'au Moyen Age à peu près. Et donc, vous pouvez voir comment le réchauffement du climat a contribué à l'augmentation des précipitations. C'est très mal connu et les modèles arrivent très mal à simuler cela sur le futur. Et c'est ce que nous essayons d'améliorer par ces carottages.

Alain hubert, président de la fondation polaire internationale, qui se trouve sur place pour le moment, souligne l'importance des travaux engagés grâce à cette station, et leur adéquation aux revendications actuelles de la jeunesse.

AH: Il ne faut quand même pas oublier que la Belgique est un petit pays. On a des petits moyens. On est une station qui a le meilleur rendement, c'est pas moi qui le dis, ce sont les autres pays, au niveau de l'efficacité pour les scientifiques. Donc, c'est encourageant. Ça nous donne envie de continuer. Cette station est une des initiatives importantes qui va tout à fait dans le sens de ce que les jeunes demandent aujourd'hui.

Notre génération, la mienne en tout cas, est celle qui a découvert qu'en fait on était responsables d'un problème causé par le changement climatique, mais si on en est responsable, ça veut dire qu'on en est donc un acteur et qu'on peut le changer. Quelque part le message est positif. Ce qu'il faut maintenant, c'est la volonté de bouger et je crois que ce qui se passe aujourd'hui est absolument essentiel pour l'avenir de notre société.

Qu'est-ce que ça fait de se rendre si loin, dans cette station en Antarctique ?

J-L T : C'est ma 23e visite en Antarctique et c'est toujours une nouveauté, particulièrement dans cette station, où c'est ma 4e visite et où on est vraiment comme dans un cocon. Cette station a été conçue de manière extrêmement, énergétiquement, rentable et on est dans des épaisseurs de bois. Tout est en bois. C'est vraiment très agréable à vivre. C'est pas la même chose que quand vous allez sur le terrain où là vous vivez dans des tentes et les conditions sont plus difficiles évidemment.

L'expression "coupée du monde" s'applique tout à fait ?

Oui, on arrive à résister aux emails. C'est déjà une bonne chose. Mais les communications sont devenues excellentes par rapport à ce que j'ai connu dans les années 80. On n'est pas tout à fait coupés du monde, mais on est ailleurs.

Vous logiez à la station mais l'expérience que vous meniez a été réalisée un peu plus loin ?

À 200 kilomètres. C'est d'ailleurs un grand avantage de cette station qui permet de rayonner à la fois vers l'océan et à l'intérieur sur le plateau antarctique, où vous savez qu'on a découvert des grandes quantités de météorites par exemple. Donc, c'est une localisation extrêmement intéressante.


Il fait froid ?

Normalement oui, mais ce que je remarque c'est que d'année en année, les températures deviennent plus élevées. Ici on a eu quelques journées à +4, +5 degrés. Ce qui est tout à fait anormal en Antarctique.

Cette station sert toujours aux recherches. Elle sert aussi aux recherches belges en particulier?

Oui, avec un petit point noir à l'horizon. La station est tout à fait performante maintenant au bout de dix ans. Mais les chercheurs belges qui vont en Antarctique n'ont malheureusement plus les moyens d'y aller parce que les financements qui étaient fournis par les services fédéraux ont été plus ou moins assassinés dans notre accord gouvernemental 2014. Donc, peut-être que demain les scientifiques belges ne pourront plus aller travailler à la station et j'espère que ça n'arrivera jamais pour mes successeurs.

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