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"Comme plusieurs mamans, je me suis fait arnaquer": en promotion sur Facebook, la boutique Lesbébévoyageurs.com n'en était pas vraiment une

Latifa nous a contactés pour éviter que d'autres personnes se fassent avoir. Rien de nouveau, mais des escrocs continuent de créer à la chaîne de fausses plateformes d'e-commerce, tout en en faisant un publicité très (bien) ciblée sur Facebook, le réseau social le plus populaire au monde. Un rappel supplémentaire de la méfiance permanente qu'il convient d'avoir quand on achète sur internet.

En quelques clics, il est très simple de se créer une page 'pro' sur le plus grand réseau social du monde, d'y faire de la publicité pour des objets à l'apparence très efficaces ou très pratiques, et d'ajouter un lien vers un site externe de commerce en ligne.

C'est une manière assez efficace pour une nouvelle plateforme de se faire connaître et de faire de la publicité. Mais c'est aussi, pour les escrocs, un moyen particulièrement efficace pour attirer les bonnes victimes. Le phénomène prend de l'ampleur (on en a déjà parlé avec les histoires de Sarah et de Filomena), mais Facebook semble bien démuni.

Latifa fait partie de ces victimes de faux sites d'e-commerce qui attirent leurs victimes sur Facebook. Cette jeune mère de famille voulait s'acheter… une poussette pour enfant. "Je me suis fait arnaquer", nous a-t-elle expliqué en contactant la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.

Dans la publicité, ils appuient sur un bouton et la poussette se replie toute seule

Pour un voyage plus pratique avec son petit garçon

En juillet dernier, quelques semaines avant de partir en vacances, Latifa est attirée par une publicité. "C'était une vidéo qui n'arrêtait pas d'apparaître sur mon fil d'actualité Facebook. C'était la publicité d'une poussette, avec une offre de lancement à 59€".

Mais pas n'importe quelle poussette. "Dans la publicité, ils appuient sur un bouton et elle se replie toute seule, en forme de valisette". Sous la vidéo, il y a de nombreux commentaires positifs ("un peu trop, j'aurais du me méfier").

Au même moment, Latifa prépare ses vacances au Maroc. "Pour la première fois, je partais avec mon petit garçon d'un an et demi, il commence à marcher. Je me suis dit que pour partir en voyage, (cette poussette) était beaucoup plus pratique pour passer la sécurité, par exemple".

Deux semaines avant son départ, elle commande donc la fameuse poussette. Dans la description de la vidéo, il y avait un lien vers Lesbébévoyageurs.com, "un site internet qui vendait des produits de puériculture".

Sur l'offre, "ils disaient que les délais de livraison étaient de deux à cinq jours". Latifa, après avoir créé un compte avec ses coordonnées, paie avec sa carte de crédit. "Tout s'est bien passé, sauf que je n'ai pas reçu d'email de confirmation, ni de numéro de suivi", comme c'est le cas avec les vrais sites marchands.


Il s'agit d'une archive trouvée sur Google: la page Facebook existe encore mais plus cette publication

Pas de poussette, puis le site disparait…

C'est le début des ennuis pour notre témoin habitant Grivegnée, qui voulait savoir si sa poussette allait bien arriver en temps et en heure, donc avant son départ en vacances. "Je les ai contactés sur leur page Facebook, via Messenger. Et ils ont répondu, ils m'ont donné un numéro de suivi, en fait un lien vers leur site, qui me disait que j'allais bien recevoir ma poussette dans les 5 jours".

Une semaine plus tard, ne voyant toujours rien venir, Latifa les recontacte. "Ils me disent alors que vu le nombre de commandes reçues, il y a un retard de  cinq semaines. J'ai expliqué que je partais en voyage, et que donc si je ne la recevais pas avant, je voulais me faire rembourser".

Latifa part au Maroc l'esprit tranquille. "Ils m'ont qu'il n'y avait aucun problème, que j'allais me faire rembourser dans les 15 jours".

Après 20 jours de vacances, "voyant que je n'avais pas reçu de remboursement, je les ai contactés à nouveau via Messenger, et ils m'ont renvoyé vers leur site, mais il n'existait plus"…

C'est à ce moment-là qu'elle se rend compte qu'elle s'est fait avoir.


Plus rien n'est accessible aujourd'hui, les escrocs ont (dû) tout fermé(er)

Une arnaque classique via les puissants algorithmes de ciblage de Facebook

Comme beaucoup d'autres, tous les jours, Latifa a été victime d'une arnaque devenue déjà classique, celle du 'faux site marchand qui fait de la pub sur Facebook'. Décryptons la méthode probable des escrocs.  

Ils ont besoin de ressources techniques et financières, car il faut créer un site web marchand (Lesbébévoyageurs.com). Et même s'il s'agit d'une coquille vide, il faut créer des fiches produits, des catégories, etc. Et surtout, ajouter un moyen de paiement officiel, tout en restant anonyme pour ne pas se faire pincer quand le pot-aux-roses sera découvert et rendu publique. Bref, ça demande une certaine expertise dans le domaine…

Dès que c'est fait, les escrocs ouvrent une page Facebook relative à leur site d'e-commerce. Et y font de la publicité, via une vidéo sans doute pompée sur les sites des vrais créateurs de cette poussette de voyage. Les escrocs prennent soin d'ajouter des faux commentaires positifs sous la vidéo publicitaire, probablement à l'aide d'une armée de faux profils qu'ils utilisent un peu partout.

Place au ciblage, essentiel. Si le plus grand réseau social au monde est si riche, c'est parce qu'il permet à n'importe quelle page de toucher une audience très précise. Et ça n'a pas de prix. Les escrocs demandent donc à ce que leur publicité apparaisse (par exemple dans le cas Latifa) sur les profils féminins âgé entre 20 et 40 ans, qui ont fait de recherches sur des billets d'avion ou des vacances, et qui ont un enfant un bas âge. Soit l'exact public cible pour une poussette de voyage…

Facebook met à disposition des pages 'pro' de puissants algorithmes qui identifient clairement cette liste très pertinente d'utilisateurs. Reste pour les escrocs à payer quelques dizaines ou centaines d'euros, afin d'en atteindre le plus possible.

Et il faut faire vite car leur arnaque est limitée dans le temps. Probablement quelques semaines, le temps que les premières victimes se manifestent et commencent à dénoncer les escrocs sur leur page Facebook et dans les commentaires sous la vidéo. Quand les dénonciations dépassent les faux commentaires positifs, les escrocs plient boutique et ferment les sites (à moins que ce ne soit Facebook qui finissent par comprendre). Raison pour laquelle plus rien n'est accessible aujourd'hui.

Latifa, elle, est "déçue car comme d'autres mamans, je me suis fait arnaquer". 59€ jetés par les fenêtres, "mais en plus, j'ai dû acheter une poussette car celle que j'avais était vraiment trop lourde". Si elle a contacté la rédaction de RTL info, "c'est parce qu'ils continuent: dans les commentaires sous la publication, des gens disaient que les escrocs avaient déjà recommencé leur manège sous un autre nom. Il faut donc que tout le monde se méfie" :


L'arnaque s'appelle désormais "On roule Loulou!"...

Nos conseils

Effectivement, la leçon à tirer de la petite mésaventure de Latifa, c'est qu'il ne faut pas se fier à une publicité sur Facebook avec de bons commentaires. Il faut toujours scruter attentivement le site web marchand (qui n'a rien à voir avec Facebook) vers lequel renvoie la publicité. A-t-il l'air fiable ? Pouvez-vous identifier clairement l'entreprise qui se cache derrière le site ? Les promotions ne sont-elles pas trop belles pour être authentiques ?

De manière générale, si vous ne connaissez pas un site, renseignez-vous toujours avant d'acheter. Des sites externes comme fr-be.trustpilot.com, qui rassemble les expériences des utilisateurs, peuvent s'avérer utile. On y voit par exemple que Lesbébésvoyageurs.com n'a qu'un seul avis, et qu'il identique à celui de Latifa :

Quant à Facebook, il semble bien démuni. Quand on a deux milliards d'utilisateurs, il est pratiquement impossible de vérifier si le contenu publié n'enfreint pas les Standards de la Communauté, sorte de Bible du bon comportement universel sur Facebook. Est-il offensant ? Tente-t-il de manipuler l'opinion ? Relaie-t-il de fausses informations ?

Facebook fait appel à des milliers de modérateurs, mais ne parvient pas à éviter les dérapages des utilisateurs malintentionnés. Alors ne lui demandez pas de vérifier si les pages des boutiques en ligne renvoient vers un site fiable ou une arnaque comme celle dont Latifa a été victime…

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