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"La N-VA sortait la grosse artillerie": Rudy Demotte accuse le parti d'avoir voulu mener à la scission du pays pendant les négociations

Rudy Demotte revient sur sa mission de préformation en binôme avec Geert Bourgeois. L'ancien préformateur a été libéré de sa mission ce lundi, par le roi Philippe. Une mission de formation d'une majorité entachée par des considérations communautaires, notamment de la part de la N-VA, a déploré Demotte au micro de Fabrice Grosfilley ce matin sur Bel RTL.


Fabrice Grosfilley : Le divorce PS et N-VA, il est définitif ?

Rudy Demotte : La N-VA nous a fait glisser sur le terrain du délitement du pays. Si la N-VA renonce à ça, on peut discuter dans le respect.

F.G. : En 4 semaines, cela n'a pas été possible de rapprocher les points de vue ?

R.D. : Lorsque Geert Bourgeois et moi-même avons reçu les rapports des informateurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte, on nous a demandé de vérifier si mettre sur pied une majorité était possible. Nous pensions qu'un travail était possible tous ensemble, et au final les simples réunions bilatérales ont permis de vérifier qu'il n'était pas possible de trouver des compromis. Les informateurs étaient de bonne volonté, mais les convergences n'ont pas été confirmées par les partis. 

Sur le plan socio-économique, nous partions de conceptions opposées, sur les perspectives budgétaires, la dette publique, la sécurité sociale. Et pour l'institutionnel, on a vu dans les négociations un fossé s'agrandir, si bien qu'on avait l'impression que la N-VA sortait la grosse artillerie, et qu'elle mettait sur la table des propositions qui pouvaient mener à la scission du pays.

F.G. : Des considérations communautaires ?

R.D. : Dans la phase de négociations, on nous a rapporté que la N-VA était plus discrète sur ces questions, mais dans la phase de préformation, on a vu en première ligne une discussion qui ne mettait pas tout de suite les points principaux en exergue. La N-VA a mis sur la table des réformes institutionnelles profondes que les autres partis politiques ne voulaient pas concevoir.

F.G. Une menace pour la sécurité sociale ?

R.D. : Nous avions, à un moment donné, étudié la question de la pérennisation de la dotation d'équilibre, donc ce qui permet d'équilibrer les comptes de la sécurité sociale grâce à l'argent du gouvernement fédéral. Ici, il y avait deux axes : l'axe communautaire et l'axe idéologique. Dans aucune des familles politiques, je n'ai trouvé une expression qui permettait de trouver un accord sur le rééquilibrage de la sécurité sociale.

F.G. : Qu'est ce que vous répondez à Charles Michel qui dit qu'il a été reçu qu'une heure, dans une discussion très formelle, et qu'il a le sentiment que les préformateurs, vous et Geert Bourgeois, n'ont pas vraiment cherché à aboutir à un accord ?

R.D. : Je trouve le propos totalement inélégant. J'ai voulu rencontré 4 libéraux : Didier Reynders, Sabine Laruelle, Sophie Wilmès et, en ce qui concerne, Charles Michel, il a eu tout le loisir de s'exprimer. Il aurait pu nous parler pendant 5 heures, s'il le voulait. Son attitude prouve qu'il était dans une posture où ceux qu'il accuse, dans une logique de bac à sable, de vouloir faire échouer les négociations, n'étaient pas ceux qu'il pointait du doigt.

F.G. : À vous entendre tous les deux, j'ai l'impression qu'on est dans une atmosphère de campagne électorale, je me trompe ?

R.D. : Je regrette que des propos comme ça puissent être tenus. Pour une personne qui se destine à l'Europe, et qui a l'intention de jouer la modération, il est plutôt dans une logique de mettre de l'huile sur le feu plutôt que dans les rouages. Moi je ne veux pas de cela. Je pense qu'il faut que le pays se mette rapidement sur les rails. 

F.G. : Ce constat d'échec total, ça veut dire qu'on se rapproche d'une réforme communautaire, voire la fin de la Belgique ? 

R.D. : Laissez d'abord le temps à Paul Magnette de conduire sa mission, il verra s'il y a une alternative. C'est un homme courageux, et intelligent, je lui fais confiance.

F.G. : En dix jours, c'est possible ?

R.D. : Avec le sentiment d'urgence qui existe, je pense que les partis qui seront consultés devront prendre leurs responsabilités. Aujourd'hui, l'Open VLD et le CD&V ont un choix à faire, un choix de société : celui de vouloir ou non maintenir l'équilibre du pays. 

F.G. Être préformateur, si c'était à refaire, vous le referiez ?

R.D. : De toute façon, je le referai, avec la même énergie et la même conviction. On ne peut pas baisser les bras, personne ne peut dire que c'est une tâche impossible, même si elle est compliquée.

F.G. : On a reporté d'autres élections, peut-être dans un mois, trois mois, six mois ? 

R.D. : Nous souhaitons que les discussions se poursuivent, qu'on se donne une chance de former une majorité. Si cette chance n'existait pas, on n'essayerait pas. 

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