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Le rappeur Gnawi, co-auteur d'un titre polémique, condamné à un an de prison au Maroc: "Soi-disant c'est un pays ouvert", déplore Abderrahim

Le rappeur marocain Gnawi, co-auteur d'un titre polémique sur le désespoir de la jeunesse de son pays, a été condamné fin novembre par le tribunal de Salé, près de Rabat, à un an de prison pour insulte à la police. Son avocat estime qu'il est surtout poursuivi pour sa dernière chanson. Une situation que dénonce un jeune Belge.

"J’aimerais signaler une injustice envers des rappeurs marocains qui ont osé crier fort tout ce que chaque Marocain sent mais n’ose pas le dire. Malheureusement comme à chaque fois, l'un d'entre eux est devant la justice pour leur chanson", dénonce Abderrahim, un jeune Belge d’origine marocaine, via notre bouton orange Alertez-nous.

"Soi-disant c'est un pays ouvert qui respecte les droits de l’Homme mais c’est juste devant les médias, la réalité est loin d'être celle-là. Je viens vers vous car je pense que c’est de mon devoir de les soutenir car chaque personne a le droit de dire ce qu’il pense", regrette-t-il.

Les rappeurs en question sont Gnawi, Lz3er et Weld lgriya. Le 29 octobre, ce trio a posté sur Youtube leur dernier titre intitulé Aach al chaab ("Vive le peuple" en dialecte marocain). Cette chanson reprend des slogans scandés dans les stades, dénonce "l'injustice" et "l'accaparement des richesses", en écho au malaise de la jeunesse marocaine.

Surtout, les paroles attaquent directement le Roi Mohammed VI, ce qui constitue, selon les médias locaux, un franchissement très net de ce qu'on appelle au Maroc les "lignes rouges".

Très rapidement, cette vidéo est devenue virale au point de cumuler 19 millions de vue aujourd’hui. 

"Depuis que je suis né, je ne cesse de subir des humiliations"

L’un des auteurs de ce titre polémique vient d’être condamné par la justice pour insulte à la police. Le 25 novembre, le rappeur marocain Gnawi a écopé d’un an de prison pour "outrage à fonctionnaire public".

"Je suis un artiste, mon boulot c'est de défendre mes droits et les droits du peuple, ce n'est pas la première fois que je subis une humiliation de la police. Depuis que je suis né, je ne cesse de subir des humiliations", a-t-il lancé pour sa défense devant le tribunal de Salé.

Selon son avocat, le rappeur de 31 ans est avant tout poursuivi pour son dernier titre, "Vive le peuple". Gnawi a cependant reconnu lors de l'audience avoir insulté la police dans une vidéo "live" sur son compte Instagram, en expliquant qu'il venait de "subir une humiliation" lors d'un contrôle policier.

Pour sa part, le représentant du parquet a brandi un CD du rappeur datant de 2014 avec un titre contenant des attaques contre la police, pour démontrer que l'accusé n'en était pas à sa première provocation.

La condamnation du rappeur a été assortie d'une amende de 1.000 DH (environ 94 euros). La Direction générale de la sûreté nationale qui s'était portée partie civile a obtenu un dirham symbolique de dommages.

A la sortie du tribunal de Salé, les proches de Gnawi ont scandé "Vive le peuple".

Flots de commentaires indignés  

L'affaire a suscité des flots de commentaires indignés sur les réseaux sociaux. Des défenseurs des droits humains comme Amnesty International ont dénoncé une "atteinte flagrante à la liberté d'expression".

Pour le ministre d'Etat en charge des droits humains, Mustapha Ramid, le dernier titre du rappeur est "répugnant", "provocateur" et "porte atteinte aux institution de l'Etat", comme il l'a dit lors d'une réunion au Parlement, selon des médias locaux.

"La violation de la loi dans n'importe quel domaine tombe sous le coup de celle-ci", avait pour sa part estimé avant la condamnation le ministre de la Culture, Hassan Abyaba, pour qui "l'art est un moyen d'expression, pas autre chose".

 

En réponse, un des co-auteurs du titre polémique, Lz3er, a sorti une nouvelle chanson intitulée "Ce qui a fait sortir Gnawi de ses gonds", qui a cumulé 600.000 vues en deux jours sur internet. "Au lieu de me réprimer, ouvre tes oreilles, je revendique le droit du peuple à l'enseignement, à la santé et au logement", dit notamment le texte.

En 2012-2013, un autre rappeur, Lhaqed, avait été condamné un an de prison pour "outrage à la police" pour un clip diffusé sur Youtube, puis à quatre mois de prison pour "ébriété sur la voie publique" en 2014.

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