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Xi Jinping en Birmanie pour dessiner sa route de la soie

Le président chinois Xi Jinping a conforté samedi sa relation économique avec la Birmanie, pays clé de son projet de nouvelles routes de la soie, avec la signature d'une trentaine d'accords portant notamment sur de nouvelles infrastructures.

Au lendemain de son arrivée dans la capitale birmane pour une visite de deux jours, le dirigeant chinois et la cheffe de facto du gouvernement birman Aung San Suu Kyi ont paraphé 33 accords, dont le projet-phare d'une gigantesque zone industrielle et un port en eaux profondes d'1,3 milliard de dollars à Kyaukphyu dans l'Etat Rakhine (ouest).

Cette région, épicentre du drame de la minorité musulmane des Rohingyas, est aussi le théâtre de violents affrontements entre l'armée et des rebelles séparatistes.

Malgré les combats, les autorités ont déclaré cette zone "ouverte aux affaires", une offre rejetée par les investisseurs occidentaux mais accueillie favorablement par les Chinois.

Pékin propose de construire un couloir économique Chine-Birmanie pour relier l'Empire du milieu à l'océan indien, un projet-clé dans sa stratégie d'influence mondiale "des nouvelles routes de la soie".

- Risques pour la Birmanie -

Peu d'informations ont filtré sur les autres accords signés samedi, mais les deux dirigeants se sont également entendus sur une lettre d'intention pour un "nouveau développement urbain" dans la capitale économique birmane, Yangon, et des études de faisabilité pour des liaisons ferroviaires.

En revanche il n'aurait pas été question de la relance du méga-barrage controversé de Myitsone, contre lequel quelques dizaines de manifestants se sont rassemblés samedi à Yangon. La Chine avait signé le contrat de construction de ce projet en 2009 avant qu'il ne soit gelé deux ans plus tard en raison de la fronde de la population locale.

"Le président chinois vient chercher ses intérêts en Birmanie mais ce n'est pas pour notre bien ", a dénoncé Aung Soe, à l'origine du rassemblement.

L'ouvrage entraînerait la disparition sous les eaux d'une région de la taille de Singapour et pourrait causer des dommages irréversibles au fleuve Ayeyarwady.

Malgré les milliards de dollars en jeu, pour certains analystes, la visite du président Xi comporte des risques immenses pour la Birmanie.

"Cela donne le sentiment une fois de plus que (les Birmans, ndlr) sont trop dépendants de la Chine et c'est une position qui est dangereuse", estime Richard Horsey, analyste indépendant basé en Birmanie.

Et les relations entre les deux voisins connaissent déjà des frictions. Conflits ethniques à la frontière, impact des barrages et des pipelines: un sentiment anti-chinois commence à poindre dans la population birmane.

- Soutien politique-

Au-delà de l'économie, la visite de Xi est "un signe de soutien envers Suu Kyi dans le contexte de la crise des Rohingyas", analyse le politologue Yun Sun.

Les enjeux sont d'autant plus importants que la Cour suprême de l'ONU s'apprête à se prononcer la semaine prochaine sur l'opportunité de prendre des " mesures d'urgence " contre la Birmanie dans le cadre d'une plainte pour génocide déposée à La Haye.

A son arrivée en Birmanie, le président chinois a évoqué "l'injustice et l'iniquité dans les relations internationales" selon le quotidien gouvernemental Global New Light of Myanmar. Il a aussi rencontré le chef de l'armée birmane Min Aung Hlaing, accusé de superviser un génocide contre les musulmans rohingyas.

Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la Paix mais vilipendée en Occident pour avoir pris la défense de l'armée birmane, a elle déclaré que la Birmanie serait toujours aux côtés de la Chine.

"Il va sans dire que des pays voisins n'ont pas d'autre choix que de se tenir ensemble jusqu'à la fin du monde", a-t-elle déclaré vendredi soir lors d'une cérémonie.

La vague de répression lancée en 2017 contre les Rohingyas, qualifiée de génocide par l'ONU, a contraint quelque 740.000 Rohingyas à se réfugier au Bangladesh.

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