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Les dentistes investissent dans du matériel de sécurité mais leur "supplément coronavirus" est désormais interdit

En cette période de Crise du Covid-19, les dentistes mettent en place de nouveaux protocoles dans leur cabinet pour accueillir leurs patients en toute sécurité. La profession s'était accordée à faire payer une partie de ces investissements par les patients. Un "supplément coronavirus" finalement interdit par les autorités.

Le 4 mai, les consultations ont repris tout doucement dans la plupart des cabinets dentaires, avec de nouvelles mesures de protection sanitaire et, parfois, un supplément Covid-19, comme nous l'ont signalé plusieurs patients. C'était le cas par exemple pour Thierry, dont le détartrage annuel a coûté 30€ de plus que d'habitude. "Si ce supplément coronavirus est réellement justifié, la mutuelle devrait intervenir", nous a-t-il écrit via notre bouton orange Alertez-nous. Alors que les associations professionnelles de dentistes réclamaient la création d'un code pour que les patients puissent se faire rembourser, la ministre fédérale de la santé, Maggie de Block, a décidé d'interdire ces "suppléments corona" à tous les professionnels de la santé. Parallèlement, l'Institut national d'assurance maladie invalidité (INAMI) souhaite développer un système de compensation en faveur des dispensateurs de soins.

La dentisterie, une activité où le risque de contamination est prégnant

Dans cette profession, le soignant est forcément à proximité de la bouche du patient, exposé à des projections de salives et de sang. "Quand on travaille en bouche on produit des aérosols", raconte Fabrice Bolland, dentiste à Bruxelles et vice-président de la Chambre Syndicale Dentaire (CSD). L'utilisation d'instruments rotatifs, de détartreurs à ultrasons, créent un nuage de micro-gouttelettes contaminé par la microflore de la bouche du patient. Ces éclaboussures contaminent les surfaces aux alentours et des micro-gouttelettes restent en suspension dans l'air, explique la presse spécialisée.

Une dépense "phénoménale" dans du matériel de protection et d'assainissement de l'air

FFP2, masques chirurgicaux, visières, calottes, surblouses... Les dentistes ont dû s'équiper pour protéger les patients comme eux-mêmes d'une contamination au Covid-19. Ils répondaient ainsi aux conseils formulés par l'institut de santé publique belge (Sciensano). 

"Les cabinets ont une dépense phénoménale au niveau de ce matériel. Je parle de plusieurs milliers d’euros pour simplement acquérir du matériel jetable", raconte Michael Cesa, secrétaire général de la Chambre Syndicale Dentaire (CSD). Sur un marché tendu, le tout a dû être payé à des prix bien supérieurs à la normale, précise-t-il. "Dans les dépôts, des boîtes de 50 masques chirurgicaux sont passées de 3, 4 euros à 25, 30, 40 euros la boite", indique pour exemple Michael Cesa.

Outre le matériel jetable, certains cabinets s'équipent d'appareils pour assainir l'air et désinfecter les surfaces : purificateurs d'air à lampes UV, appareils de pulvérisations de péroxyde d’hydrogène. Le premier coûte entre 1000 et 2000 euros, le second 3000 euros. "Le supplément, beaucoup de gens pensent que c'est simplement pour les blouses, mais dans mon cabinet, on a dû investir 15.000 euros pour pouvoir prendre les patients en charge", raconte Fabrice Bolland.

"On ne peut pas tout prendre à notre charge"

Les associations professionnelles s'étaient accordées pour appliquer un supplément coronavirus, selon les soins requis, afin de rentrer dans leurs frais. "Imaginez une mamie qui a cassé sa prothèse. Il n'y a pas d'aérosol. On ne va pas lui facturer 30 euros. Par contre on va avoir quelqu'un où on va se dire 'mince, là on part en chirurgie, il faut sortir du matériel", raconte Michael Cesa. Dans ce dernier cas, le patient était informé à l'avance du supplément (jusqu'à 30 euros). "Il faut bien qu’on le répercute quelque part. On ne peut pas tout prendre à notre charge", estime-t-il. Les dentistes ne font aucun commerce de ces mesures de protection, précise-t-il.

Que ces suppléments aient mal été perçus par certains clients, Fabrice Bolland le comprend tout à fait. "A leur place , je serais choqué. Moi je n'ai pas envie que mes patients payent un supplément. Ce qui n'est pas juste, c'est que ce soit à la charge du patient", estime-t-il. La CSD réclamait la création d'un code INAMI dédié à ce supplément coronavirus, qui aurait permis aux patients de se faire rembourser. "Vous avez des gens en face de vous qui ont toujours tendance à minimiser le problème. Nous bataillons depuis des semaines pour obtenir une réponse", déplore Michael Cesa.

Les patients peuvent désormais réclamer le remboursement du supplément à leur dentiste

Une partie de la réponse est finalement venue ce vendredi 15 mai. Dans un communiqué, l’institution fédérale stipule qu'"aucun dispensateur de soins n’est autorisé à faire payer de 'supplément corona' à son patient". "Les patients à qui un tel supplément a été facturé depuis le 4 mai peuvent le réclamer, soit directement auprès de leur dispensateur de soins, soit avec l’aide de leur mutualité", précise l'INAMI.

Néanmoins, l'INAMI reconnait la nouvelle charge financière à laquelle doivent faire face les dispensateurs de soins qui travaillent en ambulatoire et en cabinet privé : "Eux aussi ont besoin de beaucoup plus d'équipements de protection". L’institut fédéral affirme développer "un système qui permette à l’assurance soins de santé d’intervenir dans le coût des mesures et du matériel de protection spécifique". Sera-t-il à la hauteur des attentes des cabinets dentaires ? Rien n'est moins sûr. "Il faut absolument qu'on soit aider conséquemment", souligne Fabrice Bolland.

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