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Les prisons partent en grève car les mesures coronavirus vont s'assouplir: comment cela se passe à la prison d'Andenne?

Les syndicats socialiste (CGSP/ACOD), chrétien (ACV/CSC) et libéral (SLFP/VSOA) ont entamé une grève de 48 heures dans les prisons belges depuis mardi matin. Cette action intervient car aucun accord sur l'assouplissement des droits de visite n'a encore été trouvé.

Les contacts physiques entre les détenus et les visiteurs seront prochainement à nouveau autorisés. Ces derniers mois, ils étaient restreints en raison de la pandémie de coronavirus. Les syndicats socialiste et chrétien, soulignant l'augmentation des chiffres de contamination, ont réagi avec beaucoup d'inquiétudes à cet assouplissement et ont déposé un préavis de grève la semaine dernière.

Le syndicat libéral a annoncé également rejoindre le mouvement lundi. Face à l'action, l'administration pénitentiaire a donc proposé des mesures d'accompagnement, comme une période de quarantaine de deux semaines pour les détenus ayant bénéficié d'une visite sans surveillance. Mais la proposition a été rejetée par le front syndical commun.

Une nouvelle réunion a eu lieu entre les syndicats, l'administration pénitentiaire et le cabinet du ministre lundi après-midi mais n'a pas permis d'aboutir à un accord. "Ces mesures d'assouplissement représentent un véritable danger pour le personnel pénitentiaire", explique le secrétaire fédéral du SLFP Jimmy Verlez. "Les cas augmentent rapidement dans les prisons et nous souhaitons éviter qu'ils se multiplient encore."

Illustration à la prison d'Andenne 

À la prison d'Andenne, 25 des 54 agents se sont déclarés en grève. Ils protestent contre l'assouplissement des mesures sanitaires : les parloirs ne sont désormais plus équipés de plexiglas, et les visites conjugales intimes hors surveillance sont à nouveau autorisés. 

"L'administration a pris une décision sans concerter, sans discuter, et est arrivé à prendre une position qui est tout-à-fait irréalisable, note Marc Peeters, délégué syndical CSC. Il faut absolument que les gens qui sont à Bruxelles se rendent compte comment tourne une prison".

Après chaque visite intime, le détenu est censée observer un isolement de 14 jours. Difficile à appliquer tant pour les syndicats que pour les familles, comme en témoigne Livia, l'épouse d'un détenu : "Il ne voit personne, on vient lui ouvrir la porte de sa cellule pour aller prendre sa douche, il est mis à part des autres. Mais alors, ce qui est assez aberrant dans l'histoire, c'est qu'il peut sortir au préau avec les autres. J'ai l'impression que les visiteurs sont les pestiférés des prisons".

De son côté, l'administration pénitentiaire déplore ce mouvement de grève. "Le risque de contamination doit être pris en compte, mais le bien-être psychosocial des détenus et de leur famille doit également être sauvegardé. Actuellement, il n'y a que 14 détenus testé positif sur l'ensemble des prisons belges", précise Kathleen Van De Vijver, porte-Parole de l'administration pénitentiaire. 

"Nous ce qu'on voudrait bien, c'est que le Covid ne rentre pas dans les prisons. Et là, on nous donne l'impression qu'on veut le faire rentrer. À partir du moment où il est rentré, il va se transmettre de l'un à l'autre et ce qu'on risque d'avoir alors, c'est une prison complètement bloquée", ajoute Marc Peeters, délégué syndical. 

Que dit le SPF Justice ? Qu’est-ce qui a motivé la DG EPI (Direction Général Etablissements Pénitentiaires) à modifier les règles le 14/09 ?

"Le fait que depuis plus que six mois, le contact humain et physique entre détenus et leurs visiteurs est fortement réduit suite à la pandémie. Que, malgré le fait que dans la société, les règles en matière de contacts sociaux ont été fortement assouplis, ces règles sont, pendant toute cette période, restées assez strictes. A un tel point que l’écart entre ce qui est admis dans la société libre et ce qui est admis dans les prisons est de moins en moins explicable et justifiable."

Comment est-ce possible que l’application des règles soit si différente d’un établissement à l’autre ? Est-ce un manque de volonté /d’autorité des directions ou un non-respect des règles de la part des gardiens ? Comptez-vous imposer le respect des règles partout ?

"Il va de soi que c’est le but que les règles soient appliqués de la même façon partout."

Pourquoi imposer aux détenus 14 jours d’isolement après une visite hors surveillance alors que les détenus qui rentrent de congés pénitentiaires ne sont pas placés à l’isolement ?

"Les mesures proposées par l’autorité à l’occasion de la concertation sociale de la semaine passée visaient une période quarantaine aussi bien pour les détenus après VHS qu’après un congé pénitentiaire. L’autorité n’a pas retenu ces modalités à l’occasion de la concertation d’aujourd’hui, entre-autre suite à des remarques des syndicats au sujet de la faisabilité de et le charge de travail lié à ces mesures."

Comprenez-vous les craintes des gardiens ?

"Nous comprenons qu’assouplir les règles à un moment que les chiffres des contaminations augmentent, peut ressembler paradoxale mais aussi dans la société libre on s’aperçoit de plus en plus que l’aspect du bien-être psychosocial est également un facteur à prendre en compte. Nous sommes également convainque qu’il n’y aura jamais un juste moment pour assouplir le régime des visites. Il faut donc à un certain moment mettre quand-même un pas en avant en réduisant les risques aux maximum par le biais des mesures hygiéniques et sanitaires accompagnantes. C’est exactement cela que l’administration pénitentiaire a voulue faire et elle ne peut que regretter de ne pas avoir trouvé dans le chef des syndicats des accompagnateurs de route."

Alors que la grèves débute demain pour 48h, des réunions sont-elles prévues dans les jours qui viennent ? Un durcissement des règles sanitaires est-elle à l’ordre du jour ?

"Une nouvelle concertation est prévue ce jeudi, après la réunion du conseil national de sécurité".

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