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Koter à Louvain-la-Neuve, réservé aux plus riches? "Cela devient de pire en pire"

À chaque rentrée scolaire, c'est la même rengaine. Des milliers d'étudiants déambulent dans les rues de Louvain-la-Neuve à la recherche d'un endroit où loger le temps de leurs études. Plutôt que de faire des allers-retours quotidiens, nombreux sont ceux qui préfèrent s'établir à quelques mètres seulement de leur faculté. Mais tout cela a un coût. Certains dénoncent une hausse des loyers constante.

Septembre 1972: Louvain-la-Neuve voit le jour. À cette époque, la ville est créée pour accueillir les étudiants francophones de Leuven. Cinquante ans plus tard, elle figure parmi les plus grandes villes étudiantes de Belgique. Sur ses terres, se dresse principalement l'Université Catholique de Louvain, plus communément appelée l'UCLouvain. À elle seule, elle compte près de 22.000 jeunes répartis dans ses 11 facultés. Presqu’autant d’étudiants qui se retrouvent à koter, autrement dit à habiter la ville le temps de leurs études. 

Quand on étudie à Louvain-la-Neuve, plusieurs solutions d’hébergement sont possibles: 

  • des kots mis à disposition par l’UCLouvain

  • des kots proposés par des agences immobilières

  • des kots loués par des particuliers
  • louer une chambre chez l’habitant

  • des kots sociaux réservés aux étudiants les plus modestes

  • des foyers d’étudiants et logements intergénérationnels

Problème: certains dénoncent une hausse des prix depuis plusieurs années, rendant l’accès à un kot de plus en plus compliqué. "Le prix des kots à Louvain-la-Neuve est en constante évolution et cela devient de pire en pire chaque année", désespère Bastien via le bouton orange Alertez-nous. 

Afin de vérifier cette affirmation, nous nous sommes intéressés aux deux types d’hébergements les plus plébiscités par les étudiants de Louvain-la-Neuve: les kots de l’UCLouvain et ceux qui sont loués par des agences immobilières. 

Eckelmans immobilier figure parmi les principales agences immobilières de Louvain-la-Neuve. Avec son concept "Génération Campus", elle vise notamment le public étudiant à la recherche d’un logement proche de son lieu de formation. Elle possède près de 900 biens répartis dans la ville. Et chaque année, le taux d’occupation est de 100%. 

Eckelmans immobilier propose d’une part des anciens logements qui ont près de 20 ans aujourd’hui. Et d’autre part, des appartements plus récents et modernes. Le prix moyen d’un appartement ancien est de 380 euros TTC. Celui d’un appartement plus récent atteint 515 euros. Les prix des locations ont-ils augmenté au fil des années? Sensiblement, selon les dires d’Elette Rahavard, directrice générale de la gestion chez Eckelmans immobilier.

"Les vieux logements sont moins chers de par les coûts qu’ils représentent. Les nouveaux sont plus chers à cause d’une série de facteurs: le coût de la construction augmente. Il y a moins de terrain disponible donc le coût de l’achat est plus élevé", nous explique Elette Rahavard.

Selon les chiffres transmis par Eckelmans Immobilier, on observe une augmentation de 48,7% des loyers entre 2003 et 2020. Les nouveaux logements ont augmenté de 40% en moyenne contre 57,5% pour les anciens logements. Pour les anciens comme les nouveaux, le prix des charges augmente. Cela est lié au fait qu’il y a plus de contraintes aujourd’hui. Les attentes augmentent (PED, énergie basse consommation, etc). De plus, quand on rénove les anciens logements, on augmente le prix du loyer. Et on a aussi indexé le prix des loyers", nous indique la directrice. Avant d’ajouter: "Ce n’est pas une augmentation pour le plaisir. Cette augmentation se constate partout en Belgique". 

En 2000, un kot toutes charges incluses revenait à 250€ par mois 

Depuis quelques jours, les derniers biens de l’agence ont été loués. Chaque année, on assiste à deux "vagues". Les premières locations se font entre les mois d'avril et mai. Les dernières se clôturent en septembre.

Afin de vérifier cette tendance, nous nous tournons vers l’Agence de l’Aiglon, une autre agence immobilière plébiscitée par les étudiants de Louvain-la-Neuve. Entre ses kots et appartements allant jusqu’à 4 chambres, l’agence dispose d’un parc locatif avoisinant les 800 lits. David Blondel, agent immobilier, nous assure qu’à Louvain-la-Neuve, l’offre est suffisante. L’agence de l’Aiglon a, elle aussi, augmenté le prix de ses loyers au fil des années. "En 2000, un kot toutes charges incluses revenait à 250€ par mois en moyenne. Aujourd’hui, il atteint 350 €. On observe donc une augmentation de 40% comme la majorité de nos biens", indique David Blondel. Avant d’ajouter: "Nous sommes passés de 250 € à 350 € par paliers de plus ou moins 5€ par an, soit une indexation de 2%".  

Pas d'augmentation à l'UCLouvain

L'UCLouvain est également un acteur important dans la location de kots. 4.500 logements sont mis à disposition et chaque année, ils trouvent tous preneurs. Le prix moyen est de 300€ TTC. "Le loyer le plus bas est de 250, le plus élevé atteint 350€", nous explique Isabelle Decoster, responsable presse. Il y a 20 ans, il était de 295€. 

Entre 2012 et 2015, un projet d'agrandissement du parc immobilier a été entrepris. 400 logements pour étudiants ont ainsi été érigés. Le but ? Satisfaire une demande en augmentation et ainsi éviter les abus de certains privés (agences immobilières et particuliers) qui, profitaient de la pénurie de logements pour proposer des kots parfois insalubres et à un prix élevé. "Nous avons également un rôle social à jouer sur Louvain-la-Neuve. Notre objectif n'est pas de faire du profit mais de proposer des logements à des prix raisonnables", justifie la porte-parole. Chaque année, l'UCLouvain entreprend des chantiers visant à améliorer la qualité de ses kots. En 2018, 42 chantiers "avec un budget important" ont ainsi été opérés. 

De son côté, l'association des étudiants regrette le manque de projets immobiliers. Selon elle, les derniers projets en date offrent "des services de logement davantage luxueux" qui ne sont pas accessibles à tous. "Tout ceci tend à indiquer que Louvain-la-Neuve souhaite s'orienter vers une population ayant davantage de moyens financiers, ce qui mettrait de côté une partie non négligeable des étudiants", déplore Sarah Laghrami, vice-présidente en charge du social à l’AGL.

Nous ne souhaitons pas que Louvain-la-Neuve devienne un campus

Des projets immobiliers "haut de gamme"

Pour répondre à cette problématique, nous contactons Julie Chantry, bourgmestre de Louvain-la-Neuve. De par son historique, Louvain-la-Neuve est une ville très particulière. Construite pour accueillir une université, sa gestion est atypique et ne ressemble à aucune autre en Belgique. En fait, tous les terrains de la ville sont détenus par l'UCLouvain. Ici, la Ville n'est donc pas le bailleur, comme nous le détaille la bourgmestre: "L'UCLouvain est le propriétaire foncier. Elle a reçu de l'Etat tous les terrains. C'est donc elle qui vend aux promoteurs immobiliers. Aujourd'hui, la Ville est de plus en plus associée aux projets immobiliers mais il faut comprendre que nous ne sommes pas l'investigateur". 

Julie Chantry confirme que durant les dernières années, les projets qui ont été érigés étaient plutôt "haut de gamme". "On ne peut pas le nier. Pour l'instant, on constate que ce genre de constructions trouve des acquéreurs. Donc forcément, ça se développe. Mais la Ville plaide pour que ça ne soit pas l'unique modèle qui existe. Nous avons entamé des discussions avec l'UCLouvain qui est consciente qu'il y a un déséquilibre. On espère que l'équilibre sera rétabli dans les années à venir", éclaire la bourgmestre. 

Aujourd'hui, Louvain-la-Neuve compte près de 10.000 habitants domiciliés. Le nombre de koteurs est identique. Pour la bourgmestre, il est important de maintenir cette proportion. "Nous ne souhaitons pas que Louvain-la-Neuve devienne un campus", insiste-t-elle. 

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