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Les Tanzaniens aux urnes, l'opposition dénonce des "irrégularités"

Les Tanzaniens ont voté mercredi pour élire leurs président et députés, un scrutin entaché d'"irrégularités de grande ampleur" selon le principal candidat d'opposition, Tundu Lissu, qui défie le chef de l'Etat sortant John Magufuli en lice pour un second mandat.

A 16H00 (13H00 GMT), les bureaux de vote fermaient progressivement comme prévu, ont constaté plusieurs correspondants de l'AFP.

En Tanzanie continentale, qui compte 29 millions d'électeurs, la commission électorale a déclaré à des journalistes que le dépouillement commencerait mercredi soir et que les résultats seraient compilésjeudi, sans donner plus de précisions sur le jour de leur publication.

Sur l'archipel semi-autonome de Zanzibar, où 556.000 électeurs étaient appelés aux urnes, la commission électorale locale a annoncé qu'elle publierait les résultats du scrutin jeudi.

Quinze candidats s'affrontent pour la présidentielle qui devrait se jouer entre M. Magufuli, 60 ans, surnommé le "bulldozer", et M. Lissu, avocat de formation de 52 ans qui a su revigorer une opposition largement étouffée durant le dernier quinquennat.

"Des informations concernant le vote font état d'irrégularités de grande ampleur", a affirmé M. Lissu sur Twitter, citant le refus de laisser des observateurs entrer dans les bureaux de vote et la découverte d'urnes remplies, notamment à Dar es Salaam.

"Si cela continue, une action démocratique de masse sera la seule option pour protéger l'intégrité de l'élection", a-t-il prévenu avant d'aller voter en fin d'après-midi.

Interrogé par les médias locaux, le président de la Commission électorale, Semistocles Kaijage, a indiqué que les allégations de bourrage d'urnes "ne sont pas confirmées" et "n'ont pas été officiellement soumises à la commission", invitant la population "à les ignorer".

A Zanzibar, théâtre régulier de violences électorales, où les habitants votaient à la fois pour le scrutin national et pour élire leurs propres président et Parlement, la situation s'était nettement tendue mardi.

Le candidat de l'opposition à la présidentielle locale, Seif Sharif Hamad, a accusé les forces de sécurité d'avoir tué 10 personnes, ce que la police dément. Mercredi, les opérations de vote s'y sont déroulées dans le calme mais en présence d'un fort déploiement des forces de sécurité.

- "Promotion de la démocratie" -

L'opposition et plusieurs observateurs s'inquiètent de ce que le scrutin ne soit pas équitable, soulignant que plusieurs membres de la commission électorale ont été nommés par M. Magufuli lui-même.

"J'espère que le scrutin se déroulera en douceur et que la commission électorale sera juste avec tous les candidats", a souhaité Jackson Daudi, électeur rencontré à Dodoma, la capitale administrative.

Mercredi, l'accès à plusieurs messageries ou réseaux sociaux tels que WhatsApp et Twitter, était bloqué sur l'ensemble du territoire à moins d'utiliser un réseau privé virtuel (VPN), ont constaté les correspondants de l'AFP.

"Ce jour est un jour important pour la promotion de la démocratie dans notre pays. (...) Que Dieu bénisse les électeurs", a déclaré, après avoir voté à Dodoma, M. Magufuli du CCM ("Parti de la révolution"), au pouvoir depuis l'indépendance en 1961.

Son premier mandat a été marqué par un recul très net des libertés individuelles et des droits humains dans le pays, selon de nombreuses organisations de droits de l'Homme.

Les rassemblements politiques hors période électorale ont été interdits, des lois draconiennes contre les médias adoptées, des journalistes, activistes et membres de l'opposition arrêtés. Plusieurs membres de l'opposition ont été tués.

M. Magufuli met en avant sa lutte contre la corruption, l'extension de l'accès à l'éducation gratuite et une politique de grands projets d'infrastructures dans les domaines hydroélectrique et ferroviaire. Il a également ressuscité la compagnie aérienne nationale.

- "Farce" électorale -

Candidat du Chadema (Parti pour la démocratie et le progrès), M. Lissu est rentré au pays fin juillet après trois ans d'exil. En septembre 2017, l'opposant avait été victime d'une tentative d'assassinat - qu'il assure politiquement motivée - devant son domicile à Dodoma.

Atteint de 16 balles, il a dû subir 20 opérations chirurgicales. Désormais, le quinquagénaire boitille, mais il a quand même su faire campagne et attirer les foules.

Au point qu'en octobre, le leader du populaire parti d'opposition ACT-Wazalendo, Zitto Kabwe lui a apporté son soutien pour la présidentielle.

En retour, le Chadema s'est rangé pour la présidence de Zanzibar derrière Seif Sharif Hamad, un vétéran de l'opposition locale, candidat sous la bannière de ACT-Wazalendo.

Mardi, M. Hamad avait dénoncé "une farce" électorale, après avoir passé plusieurs heures aux mains de la police.

La campagne électorale s'est tenue sans aucune considération pour le coronavirus, M. Magufuli ayant déclaré son pays "libéré du Covid" en juillet, grâce aux prières.

Le FMI prévoit que la Tanzanie échappera à la récession cette année, en dépit de la pandémie, avec une croissance d'1,9%.

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