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Répartition des patients: le plan prévu est chaotique, les soignants perdent des heures à trouver des places

Le nombre de nouvelles hospitalisations en Belgique continue d'augmenter. Un plan de répartition des patients entre les hôpitaux est prévu pour soulager les services à saturation. Ambulances indisponibles, places proposées finalement indisponibles, absence de coordination nationale... En pratique, le transfert des patients se révèle bien plus compliqué à mettre en œuvre.

Avec 5.924 patients actuellement hospitalisés pour le Covid-19, la Belgique a dépassé le pic des hospitalisations du 6 avril, 5.759 malades étaient alors hospitalisés. Les hôpitaux sont débordés et craignent de devoir choisir parmi les malades. À l'échelle nationale, un plan de répartition a été mis en place. Il comporte cinq phases (0, 1A, 1B, 2A et 2B). Concrètement, le nombre de lits réservés aux malades du coronavirus dans les unités de soins intensifs évolue selon la phase.

Afin de mieux répartir la charge de travail du personnel soignant et garantir une prise en charge optimale des patients, il est prévu que les unités de soins intensifs proches de la saturation donnent la priorité aux transferts de patients vers des hôpitaux moins sollicités avant d'augmenter leur capacité de lits. Lambert Stamatakis, coordinateur entre la Province du Hainaut et les hôpitaux explique en théorie ce qu'il doit se passer. "Il y a un tableau qui est réalisé tous les jours qui nous est envoyé et qui dit 'dans tel hôpital il reste 2 places aux soins intensifs et 8 places en hospitalisation classique', par exemple. Sur base de ce tableau et des contacts qu'on a avec le centre d'appel d'urgence, on sait où on peut envoyer, ou pas, des patients". En pratique la situation apparaît bien plus complexe.

Durant 5 heures il n'y avait plus aucune ambulance disponible sur la province puisque tout le monde était en déplacement

À Liège où les hôpitaux sont à saturation, le chef des soins intensifs à l'hôpital MontLégia Philippe Devos se heurte à d'importants problèmes. "Hier, sur l'après-midi, durant 5 heures il n'y avait plus aucune ambulance disponible sur la province puisque tout le monde était en déplacement", explique-t-il. Avant même de trouver le moyen de transporter un patient vers un hôpital, le centre d'appel pèche dans la recherche de places disponibles. Alors que le centre de régulation dirige le patient vers un hôpital, ce dernier est finalement saturé lui aussi : "On nous a annoncé un hôpital pour un malade, auquel on a téléphoné mais qui était complet. La régulation nous a donné le nom d'un deuxième hôpital qui entre-temps était devenu complet aussi. Puis on nous a donné un nom d'un troisième hôpital qui finalement était disponible", regrette le chef des soins intensifs.

Ces dysfonctionnements provoque une perte de temps considérable pour les soignants. "On passe des heures et des heures au téléphone à s'assurer que ce qui nous est annoncé par la régulation est correct et actuellement avec l'afflux des patients, une fois sur deux les informations sont incorrectes et on doit chercher à nouveau. Donc on a un temps médical consacré à la recherche de place qui devient au-delà du raisonnable", déplore Philippe Devos.

Des transferts quasi-impossibles à l'échelle du pays

Même constat dans le Hainaut. "Dimanche, j'ai dû passer 2 heures pour pouvoir transférer deux patients qui étaient arrivés aux urgences et qui nécessitaient une prise en charge dans des lits de soins intensifs. Ce n'est pas acceptable de perdre du temps alors que tout le personnel est occupé à soigner des patients dans les unités" rapporte Wissam Bou Sleiman, médecin chef de l'hôpital EpiCURA à Ath. Ce responsable regrette un manque de coordination nationale : "Ces transferts sont quasi impossible au-delà de la frontière linguistique, ils sont très compliqués vers Bruxelles. On est confrontés à l'absence de règles ou d'obligation de répartition. C'est vraiment quelque chose qui n'est pas régulé d'une façon centralisée à l'échelle nationale".

À travers une lettre ouverte diffusée mercredi, les médecins-chefs des hôpitaux du Brabant wallon, du Hainaut et de Namur lancent un "cri de détresse et d'impuissance". "Actuellement, nos hôpitaux ne sont plus en capacité de soigner tous les patients", lancent-ils. La constitution d'un plan de répartition plus clair et à échelle nationale figure parmi les demandes adressées aux autorités.

Rappel des cinq phases du plan hospitalier

Nous sommes actuellement à la phase 2B

Phase 0

15% des lits de soins intensifs réservés pour Covid-19.
Chaque hôpital réserve 4 fois cette capacité en lits normaux, hors soins intensifs.
Il y a au total 300 lits de soins intensifs et 1200 lits normaux.

Phase 1A

25% des lits de soins intensifs réservés pour Covid-19.

Phase 1B

50% des lits de soins intensifs réservés pour Covid-19.

On commence à phaser/planifier les soins normaux comme certaines opérations chirurgicales non urgentes.

Phase 2A

60% des lits de soins intensifs réservés pour Covid-19.

Phase ultime 2B

2000 lits de soins intensifs et 8000 lits supplémentaires, comme au pic de l'épidémie en avril.

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