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L'archevêque de Washington va devenir le premier cardinal noir américain

L'archevêque de Washington Wilton Gregory, sagement en quarantaine à Rome, a enchaîné via internet des entrevues minutées tel une vedette hollywoodienne avant un grand lancement. Car samedi, il deviendra le tout premier prélat noir américain à s'agenouiller devant un pape pour devenir cardinal.

Par ce choix "très important", l'Eglise catholique affiche "son soutien à la communauté afro-américaine", se réjouit le prélat de 72 ans.

"Je suis tout seul, à ce stade un individu symbole", confie à l'AFP le natif de Chicago, avec un large sourire. Il rappelle néanmoins que le père Augustus Tolton, né dans le Missouri de parents esclaves au 19ème siècle, premier prêtre afro-américain (ordonné à Rome car aucun séminaire américain ne voulait de lui), pourrait bien être béatifié.

Le premier archevêque noir de la capitale américaine, depuis dix-mois, n'avait pas hésité en juin à fustiger la tentative du président américain d'"intimider" les foules, en instrumentalisant la religion. Donald Trump venait de poser bible à la main devant une église à quelques pas de la Maison Blanche, après la dispersion brutale de manifestants antiracistes la veille.

Le prélat s'est fait un nom aussi en défendant la "tolérance zéro" contre les abus sexuels du clergé, notamment lorsqu'il fut président de la Conférence épiscopale américaine au début des années 2000.

En sanctionnant des cardinaux impliqués dans des scandales sexuels, le pape François a aussi prévenu que la haute hiérarchie ne serait plus protégée à l'avenir.

Le Saint-Siège vient de publier un rapport accablant sur le très influent cardinal Theodore McCarrick, un ex-archevêque de Washington défroqué par le pape François début 2019, après avoir été jugé coupable d'agressions sexuelles sur un mineur et des adultes. "Un rapport attristant, mais important pour l'avenir" pour réviser le processus de sélection des évêques, commente Wilton Gregory.

Autrefois surnommés "princes de l'Eglise" -lorsqu'ils devaient tenir leur rang avec une étiquette digne des princes de sang- ils seront treize nouveaux cardinaux samedi choisis par le pape François.

- Venu seul à Rome -

En près de huit ans de pontificat, le pape argentin de 83 ans a sélectionné la majorité des "cardinaux-électeurs" pouvant élire son successeur tant qu'ils ont moins de 80 ans, des prélats très souvent en phase avec ses idées.

"Le Saint-Père a mis un point d'honneur à inclure dans le collège des cardinaux de différentes races, langues, cultures", se félicite Mgr Gregory. "Il a nommé des cardinaux dans des pays qui n'en avaient jamais eu, il veut clairement un collège de cardinaux qui reflète la grande diversité de l'Eglise".

Comme de coutume, les nouveaux s'agenouilleront samedi devant le pape pour recevoir leur toque quadrangulaire pourpre -ou barrette- dans le cadre somptueux de la basilique Saint-Pierre, en présence toutefois d'un public très réduit.

Avec la pandémie, deux Asiatiques promus ne feront pas le voyage et nombre de vieux cardinaux ne viendront pas saluer les nouveaux. Mgr Gregory est venu à Rome avec un assistant, sans inviter famille et amis, "simplement heureux de participer avec le pape François à un consistoire qui sera inhabituel".

Le futur cardinal américain bénéficie aussi d'une image de modéré et d'homme de dialogue, dans une Eglise catholique américaine extrêmement divisée entre progressistes et ultra-conservateurs souvent hostiles au pape, prenant position dans l'arène politique.

"Cela doit changer. Les divisions qui apparaissent si âprement dans la sphère publique ne correspondent pas à notre vocation dans l'Eglise", tacle l'archevêque. Sauf que la guerre interne, très focalisée sur la morale sexuelle, semble loin de se calmer.

Dès le 12 novembre, le pape François -aux antipodes de Donald Trump sur les migrants, la peine de mort, la justice sociale ou encore la primauté des marchés financiers- avait félicité le président américain élu Joe Biden, qui deviendra le deuxième président catholique des Etats-Unis après John F. Kennedy.

Dans la foulée, la président de la Conférence des évêques catholiques des Etats-Unis, l'archevêque de Los Angeles, José Gomez, a institué une commission pour examiner le programme pro-avortement de Joe Biden, qui pourrait être "une menace sérieuse pour le bien commun".

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