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Pédophilie: verdict attendu pour l'ex-chirurgien Joël Le Scouarnec

Après avoir échappé pendant 30 ans à la justice, l'ex-chirurgien Joël Le Scouarnec, accusé de viols et agressions sexuelles sur quatre mineures à l'époque des faits, va connaître son sort ce jeudi devant les assises de Charente-Maritime.

L'homme qui aura 70 ans le jour du verdict, encourt la peine maximale de 20 ans de réclusion criminelle. Après les plaidoiries des parties civiles le matin, le réquisitoire de l'avocat général et la plaidoirie de la défense, la décision de la cour et du jury est attendue tard dans la soirée.

Joël Le Scouarnec comparaissait depuis lundi à huis clos devant la cour d'assises à Saintes, devant laquelle il a lâché des aveux inattendus mais au compte-gouttes, entre "stratégie" d'"amnésie" et "manipulation", selon les avocats des parties civiles.

Ce premier procès, qui s'est tenu dans une ambiance électrique, est le premier volet d'une affaire de pédophilie "hors normes" pendant 30 ans.

Le médecin autrefois respecté, père de trois fils, est en effet également mis en examen depuis octobre à Lorient (Morbihan), dans une deuxième procédure, pour viols et agressions sexuelles sur 312 victimes potentielles identifiées à la lumière de ses "carnets" intimes découverts en 2017. Il a reconnu certains faits.

- "Tout ce qu'elles disent est vrai" -

A Saintes, l'ancien chirurgien est jugé pour agressions sexuelles sur sa nièce Aurélie* dans les années 90 à Loches (Indre-et-Loire) et sur une patiente, Amélie*.

Il est également accusé de faits de viols (pénétrations digitales), à la même période, sur Helena*, une autre nièce, et sur Lucie*, sa petite voisine à Jonzac (Charente-Maritime). C'est cette fillette qui, en dénoncant ce voisin, avait permis l'arrestation de Le Scouarnec en mai 2017. Depuis, il reconnaissait des agressions sexuelles mais niait en bloc les faits plus graves de viols.

Aux premiers jours d'audience, l'accusé a, selon les avocats des victimes, joué la "stratégie" de l'"amnésie", restant "froid" et "fermé" aux questions des parties civiles, avant de concéder ses premiers aveux, sous l'insistance de ses victimes.

Mardi, il a ainsi fait un premier pas en avouant des faits de viols, dans les années 80 sur trois victimes anciennes, dont les cas avaient été écartés par l'enquête car prescrits. Puis confrontée mercredi à l'aînée des deux nièces, il a reconnu les avoir violées elle et sa soeur, en versant quelques larmes.

"C'est la première fois qu'il reconnaît des pénétrations, c'est un vrai soulagement pour les victimes", "une avancée énorme", selon Me Delphine Driguez, avocate d'Helena* et Aurélie*, âgées aujourd'hui de 30 et 35 ans.

"Tout ce qu'elles disent est vrai", a convenu l'accusé depuis son box, selon plusieurs avocats.

Il a cependant provoqué la déception sur le banc des victimes en refusant ces aveux concernant sa voisine de Jonzac, 10 ans aujourd'hui. En avril 2017, elle avait confié à ses parents que l'homme avait montré son "zizi" dans le jardin mitoyen avant de révéler un viol digital. Le médecin "n'a pas le souvenir" de ce viol, a confirmé son avocat Me Thibaut Kurzawa.

La question d’une sorte de "déni" et sa conséquence, "l’oubli", est "une thèse abordée par plusieurs experts et qu’on ne peut exclure", a-t-il insisté au cours du procès.

Les aveux de Le Scouarnec sont "très stratégiques", a dénoncé Me Francesca Satta, avocate de Lucie*, évoquant la "domination" de l'accusé : "Il est dans un échiquier et il avance plutôt bien ses pions".

Question centrale du dossier, une possible "omerta familiale" a longuement agité les débats. Les parties civiles ont notamment dénoncé les silences de son ex-femme et de sa soeur. Celle-ci avait recueilli les confidences de ses filles à la fin des années 90. Il n'avait jamais été dénoncé.

"Si des adultes avaient joué leur rôle et n'avaient pas été défaillants, on ne serait pas à faire ce procès en 2020", a regretté Me Frédéric Benoist, avocat de l'association La Voix de l'Enfant.

* prénoms modifiés

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