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Coronavirus: pour Valérie, il est insensé de ne pas pouvoir inviter à Noël ses parents quand ils "font tout ensemble"

La règle de ne pouvoir inviter qu'une seule personne (sauf si on vit seul, on peut alors inviter deux personnes) à Noël pose problème à de nombreux Belges. Valérie vit avec son mari et ses deux enfants à Arlon. Elle ne comprend pas pourquoi elle ne peut pas inviter ses deux parents qui vivent ensemble et dès lors ne forment qu’une seule bulle.

"Mes parents ont 76 et 81 ans, ils font tout ensemble. Pourtant, je ne peux pas les inviter pour Noël car ils sont deux. Pourquoi cette différence ? Ils ne se quittent pas et forment une seule entité" dit Valérie. Dans le cadre des mesures contre l'épidémie de coronavirus en Belgique, le comité de concertation a décidé le 27 novembre dernier que la règle en vigueur d'une seule personne invitée par foyer serait maintenue. En matière de contacts rapprochées, un seul assouplissement a été accordé. Il concerne les personnes seules qui pourront accueillir deux invités. le 24 ou le 25 décembre Mais pour Valérie, un couple comme celui de ses parents qui vivent ensemble, est à considérer comme une seule personne. "Pourquoi devoir choisir entre mon père et ma mère alors qu’ils forment une seule et unique bulle ? Si l’un attrape le coronavirus, l’autre aussi" pense cette femme qui vit avec mari et enfants à Arlon en province de Luxembourg alors que ses parents habitent dans le Brabant wallon à Ottignies. Une distance non négligeable qui rend les visites peu fréquentes.

Les bons élèves

Valérie travaille dans l’enseignement supérieur. Depuis le premier confinement, elle est en télétravail, prodiguant ses cours à distance. Son mari est travailleur transfrontalier au Luxembourg et a également pris des dispositions pour éviter une contamination. Quant à ses enfants qui ont 8 et 10 ans, bien que le masque ne soit pas obligatoire à leurs âges, "mon fils a tenu à le mettre quand même" souligne sa maman qui insiste pour dire que chacun a respecté scrupuleusement les règles dans l’espoir de revoir au plus vite ses grands-parents.

Depuis le premier confinement, c'est le frère de Valérie qui s’occupe de leurs parents. Il vit aussi à Ottignies, n’est pas marié et n’a pas d’enfant. "Il est très prudent et il voit mes parents tous les jours, explique Valérie. "On a le droit de voir qu’une seule personne. On devrait donc choisir mon frère à Noël alors qu'il voit mes parents tous les jours. C’est une bulle: mon frère et mes parents. Je trouve assez terrible que les parents doivent choisir entre leurs enfants."

La jeune femme compare sa situation avec celles de ses amis: "Beaucoup de quarantenaires ont des parents de 70-80 ans. On trouve qu’il y a une différence. On n’arrive pas à comprendre qu’une maman veuve de 80 ans puisse passer Noël chez ses enfants et petits-enfants. Et les couple âgés toujours ensemble, ils font tout ensemble, ne se séparent jamais, mais ils ne peuvent pas voir leurs familles. Ils doivent payer d'avoir la chance d’être encore à deux à 80 ans."

Trop de pression

Pour Valérie, la pression mise sur les personnes âgées est forte. Ses mots sont durs : "Soit on les laisse en maison de repos où on les laisse crever comme des chiens dans des cages. Soit ils sont encore chez eux, ils ne peuvent rien faire depuis des mois. L’isolement est une épreuve pour eux."

Après deux confinements, l’éloignement est dur à vivre pour Valérie. D’autant plus que son père est en rémission d’un grave cancer depuis fin 2019: "Mon père est très âgé, personne ne peut savoir si c’est son dernier Noël. Ils sont là, ils ont des petits enfants de 8 et 10 ans, c’est d’une cruauté absolue. On les met dans une situation de désespoir alors qu’on est supposé prendre soin d’eux plus que jamais. Mon père a été très malade, il est passé par le chas de l’aiguille et on veut vraiment profiter de lui."

Pour Yves Van Laethem, porte-parole interfédéral dans la lutte contre le coronavirus, la possibilité d’inviter une bulle de deux personnes plutôt qu’une seule aurait pu être envisagée: "C’est ce que certains ont proposé au gouvernement, mais ça a été refusé. C’est effectivement un risque qu’on aurait pu envisager, un risque faible, mais tout de même plus élevé qu’avec les mesures actuelles."

Se confiner avant Noël?

Si la situation est difficile pour Valérie, elle est encore moins compréhensible pour ses enfants. "On ne se voit pas toutes les semaines en temps normal. Ils ne souffrent pas de la même manière que ceux qui voient papy et mamy tous les mercredis. Les enfants ont l’habitude de les voir pendant les vacances, un mois l’été. Ici ça a été compliqué. On les a vu cet été, mais pas du tout avec la même liberté et la même longueur. Pour les enfants, ils ne voient plus leurs familles. Pour eux Noël, c’est extrêmement important. Depuis le début de l’année, on leur demande d’être super prudents. C’est la carotte, ‘pour voir papy et mamy à Noël’, ‘plus on est prudent, plus on pourra voir papy et mamy’. C’est un coup de massue."

Pourtant Valérie avait tout prévu. "Quand on a commencé à penser à Noël, j’ai tout d’abord vérifié quand tombaient les vacances." Cette année les vacances commencent une semaine avant le réveillon. "On sait que la période d’incubation est à peu près d’une semaine. Entre le dernier jour de cours et le jour où ils pourront voir papy et mamy, ça fait une semaine. On se confinera strictement cette semaine-là."

"Bien souvent on a l’impression qu’il n’y a aucune confiance en le bon sens des gens. Les gens de bon sens sont punis pour ceux qui n’en ont pas," conclut Valérie.

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