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Intrusion à la préfecture de Corse pour le rapprochement de détenus sur l'île

La tension est montée lundi en Corse autour de la détention de deux des condamnés pour l'assassinat du préfet Erignac: pour réclamer leur rapprochement sur l'île, une vingtaine d'hommes ont envahi la préfecture à Ajaccio, où des échauffourées ont eu lieu.

"Ce groupe d’une vingtaine d’individus" avait "la volonté d’accéder, par la force, au bureau du préfet et de ses services. Cette tentative a échoué", a indiqué la préfecture dans un communiqué. Parmi eux se trouvait notamment selon la préfecture le fils d'Alain Ferrandi, un des deux membres du "commando Erignac" soutenu par les manifestants, le deuxième étant Pierre Alessandri.

Après leur intrusion, "par volonté d'apaiser les choses", le coordonnateur pour la sécurité en Corse, Michel Tournaire, a indiqué lors d'une conférence de presse avoir reçu les manifestants dans son bureau pendant 30 à 45 minutes mais a regretté que ceux-ci aient ensuite refusé de quitter les lieux.

Lors de leur évacuation par la police, deux membres des forces de l'ordre et cinq manifestants ont été blessés dans "une mêlée où des coups ont été échangés des deux côtés", a indiqué M. Tournaire, dénonçant un "coup médiatique" et précisant que le matériel de son bureau --ordinateur, écrans-- avait "été projeté", "une armoire forte poussée", une table de réunion et un bureau "cassés".

"J'ai déposé plainte pour entrée en infraction dans un bâtiment administratif, violences en réunion et destruction de matériels", a-t-il précisé.

- "Intrusion inadmissible" -

Une enquête confiée à la police judiciaire a été "ouverte pour dégradations, rébellions en réunion, violation de domicile et éventuellement séquestration mais on attend les plaintes", a déclaré à l'AFP la procureure de la République d'Ajaccio, Carine Greff.

Au bout de 1H30 dans la préfecture, le groupe d'hommes est sorti, certains avec du sang au visage, en applaudissant et criant "Liberta" ("liberté" en langue corse).

"On avait la volonté de montrer aujourd'hui qu'on est prêt à se mobiliser pour faire respecter le droit (...) et permettre à Alain Ferrandi et Pierre Alessandri de rentrer en Corse", a indiqué aux médias l'un d'entre eux sans donner son nom.

"On n'a rien cassé, on n'a bousculé personne, on a été pacifique et la réponse de l'Etat a été la violence comme souvent en Corse", a-t-il ajouté, demandant une réponse "dans les plus brefs délais du gouvernement sur une date précise de retour en Corse" des deux hommes, actuellement emprisonnés en région parisienne, à Poissy (Yvelines).

Le ministre de l'Intérieur, Gérard Darmanin a condamné sur Twitter "avec la plus grande fermeté" cette "intrusion inadmissible" et "les dégradations qui ont été commises".

"Le refus d'appliquer le droit au rapprochement de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, c'est l'injustice fondatrice", a déclaré à l'AFP le président autonomiste de l'exécutif de Corse Gilles Simeoni.

"Répondre à une occupation pacifique de jeunes qui dénoncent une injustice, et à mon avis ils sont légitimes à la dénoncer, par des coups de matraque, je pense que c'est commettre une faute supplémentaire", a-t-il ajouté.

Le président indépendantiste de l'Assemblée de Corse Jean-Guy Talamoni et l'association de défense des prisonniers Sulidarita ont eux aussi apporté leur soutien aux auteurs de cette action. Dans un communiqué commun avec le représentant de Corsica Libera à l'Assemblée de Corse, M. Talamoni a jugé que l'actuel préfet de Corse, Pascal Lelarge était "définitivement disqualifié pour occuper un poste de responsabilité sur la terre de Corse" et a appelé à "son départ immédiat".

Les groupes d'opposition à l'Assemblée de Corse, Per L'Avvene (droite) et "La Corse dans la République" (droite) ont dénoncé une "escalade pré-électorale qui vient masquer l’incurie et l’absence de résultats sur des dossiers cruciaux dont la Collectivité de Corse", dirigée par une coalition nationaliste, "à la charge".

Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, arrêtés en mai 1999, ont été condamnés en juillet 2003 à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac, le 6 février 1998, comme Yvan Colonna, arrêté en juillet 2003 et condamné en décembre 2007.

Le refus du Premier ministre Jean Castex, le 21 décembre, de lever le statut de "détenu particulièrement signalé" pour MM. Alessandri et Ferrandi, a éteint l'espoir d'un transfert prochain au centre pénitentiaire de Borgo (Haute-Corse), qui n'est pas habilité pour accueillir ce type de prisonniers.

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