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Coronavirus en Belgique: à cause des mesures sanitaires, Mirella ne peut pas rendre visite à sa mère hospitalisée après un AVC

Un an après la première vague, l'épidémie de Covid-19 n'est toujours pas sous contrôle. Dès lors, les mesures sanitaires visant à réduire sa propagation restent de vigueur. Parmi elles: la suspension des visites dans les hôpitaux. Pour les patients et leurs familles, la situation est de plus en plus compliquée à vivre, comme nous explique Mirella, une jeune Liégeoise. Celle qui n'a pas vu sa mère hospitalisée depuis près de 3 mois, livre un témoignage déchirant.

Dans 6 semaines, Mirella accueillera son premier enfant. Un véritable bonheur pour cette habitante de Liège qui rêve de partager ce moment unique avec sa famille. Mais un grave accident survenu en novembre 2020 est venu bouleverser cette belle histoire. Via le bouton orange Alertez-nous, cette jeune femme qui "ne sait plus comment se faire entendre" a décidé de raconter "son histoire", "son injustice".

Le 22 novembre 2020, Rosaria, sa maman, lui rend visite. Ensemble, elles passent une partie de l'après-midi. Quand vient l'heure de se quitter, Rosaria se sent fébrile. "Elle me disait qu'elle ne se sentait pas bien et qu'elle avait la tête qui tournait", se souvient Mirella. Quelques heures plus tard, alors qu'elle se trouve chez elle à Bruxelles, la douleur devient plus forte. La mère de famille s'écroule. Son mari, le père de Mirella, appelle immédiatement les secours. Un SMUR et une ambulance sont dépêchés sur place et transportent Rosaria jusque l'hôpital Erasme à Bruxelles. Le diagnostic des médecins tombe: elle vient de subir un AVC. 

Mon frère me l'apprend délicatement par téléphone car je suis enceinte.

Mirella se souvient de l'instant où on lui communique la terrible nouvelle. "Mon frère me l'apprend délicatement par téléphone car je suis enceinte. Maman est tout pour moi", écrit-elle. Mirella nous explique que l'AVC que sa mère a subi est considéré comme "sévère" par les médecins. Deux opérations ont été nécessaires, affirme-t-elle. "Une fois pour essayer d'enlever le caillot au cerveau et une fois pour lui enlever un morceau de sa boite crânienne qui lui faisait pression sur son cerveau", confie-t-elle. 

À ce moment-là, la crise sanitaire du Covid perturbe toujours le fonctionnement habituel des hôpitaux. Les visites sont comptées, le nombre de personnes autorisées également. "Une seule personne peut voir maman au soins intensifs", se remémore Mirella. À ce moment-là, aucun doute pour la famille. Mirella et son frère s'accordent et donnent le nom de leur père. "Évidemment mon papa est privilégié. Seul, il souffre énormément", justifie la jeune femme.

Mais pour la jeune Liégeoise, la situation devient intenable. Impossible de rendre visite à celle avec qui elle noue, depuis toujours, une relation fusionnelle. Elle doit se contenter des mots de son père et des rapports des médecins.

Chaque moment est précieux auprès de sa famille

Une semaine et demi plus tard, l'état de santé de Rosaria lui permet d'intégrer le service de neurologie de l'hôpital Erasme. Puis celui de la revalidation. "Noël approche et maman est seule. Elle ne peut voir toujours personne", se rappelle la jeune femme. Avant d'ajouter: "C'est très dur pour elle, car pour le moment elle est toujours hémiplégique. Elle souffre de ne pas nous voir. Elle veut voir mon petit bidou qui grandit".

Aujourd'hui, Mirella ne comprend pas que les visites soient encore si restreintes. "Le soutien psychologique est important dans les cas de patients qui ont subi un AVC sévère. On voit dans les médias les gens qui se plaignent de plus avoir de vie sociale, plus de sortie, plus voir les copains. Moi aussi, je souffre de l'isolement mais aujourd'hui, je n'ai presque jamais entendu parler des gens qui sont isolés car ils sont hospitalisés. On parle des homes, des enfants, mais rien pour ces gens qui veulent voir leur famille. Maman a frôlé la mort. Je ne veux pas perdre mon temps. Chaque moment est précieux auprès de sa famille", confie-t-elle.

Pas de visites sauf avis médical ou sous certaines circonstances

Comme tous les établissements hospitaliers du pays, l'hôpital Erasme a pris des dispositions face à l'épidémie. À la première vague, toutes les visites avaient été interdites avant d'être de nouveau permises lors de la phase de déconfinement.

Lors de la deuxième vague, la direction de l'hôpital n'a pas hésité à les suspendre, une fois de plus. Ainsi, depuis le 15 octobre, le mot d'ordre est clair: pas de visite. "En tant qu'hôpital, nous avons une obligation de prudence pour éviter les contacts et la propagation de l’épidémie", nous explique-t-on.

Désormais, les patients ne peuvent recevoir de visites de leurs proches "sauf sous avis médical et sous certaines circonstances".

Les visites sont permises pour les suivis de grossesse, en néonatalogie ou pour les patients en fin de vie. Pour les autres services, selon la spécificité du cas, des autorisations de visite peuvent être accordées. Cela dépend de l'état du patient et répond obligatoirement à un avis de spécialiste. "Dans certains cas, le médecin estime que pour la santé mentale ou autre, il faut autoriser les visites au patient", explique l'hôpital.

Si la mère de Mirella peut aujourd'hui recevoir la visite de son mari, c'est parce qu'un avis médical allant en ce sens a donc été émis. Secret médical oblige, impossible de connaître les raisons qui ont motivé une telle décision. Le fait qu'il s'agisse d'une hospitalisation longue durée et que l'aspect psychologique est primordial dans son rétablissement pourrait expliquer l'autorisation de visite. 

Impossible d'assouplir ces règles à l'heure actuelle

Quand des visites sont permises, les modalités dépendent et sont décidées par les médecins en charge du patient. 

Actuellement, l'hôpital Erasme, comme l'ensemble des établissements du pays, est en phase 1B. Concrètement, la moitié de ses lits des unités de soins intensifs sont réservés aux patients atteints du Covid-19. 

Le personnel est conscient que les mesures actuelles sont difficiles pour les patients, comme pour leurs familles. Mais au vu de la situation épidémiologique actuelle, impossible de les assouplir, au grand dam de l'ensemble des soignants. "On se rend compte que c'est dur. Mais on ne le fait pas de gaieté de cœur. Le fait de faire venir des visiteurs, et donc potentiellement de faire entrer un virus, est dangereux. Car on met à mal à la fois la personne visitée mais aussi les autres patients", insiste la porte-parole.

Pour pallier l'interdiction des visites, l'hôpital s'est adapté depuis la première vague. Des smartphones et des tablettes ont été distribués dans les services afin que les patients puissent entretenir le lien avec leur famille. Des conversations vidéo sont ainsi possibles. "Ça ne remplace pas une visite mais c'est plus humain et gai qu'un simple coup de téléphone", concède la porte-parole. 

De plus, une conciergerie a été installée. Les proches des patients peuvent ainsi leur déposer des colis dans cet espace accessible tous les jours de la semaine. 

C'est très frustrant et douloureux

De son côté, Mirella se prépare progressivement à devenir jeune maman. Autant de moments qu'elle aurait aimé partager avec sa mère. "Devenir grand-mère pour la première fois est un grand moment. Surtout pour ma maman, elle attendait cela depuis si longtemps. Et voici qu'elle se retrouve en milieu hospitalier, sans presque rien comme visite, sans soutien familial, depuis 3 mois", témoigne-t-elle. 

Mirella a fait ses calculs. Si l'on imagine un déconfinement en mai, que les visites à plusieurs dans les hôpitaux sont de nouveau possibles, son enfant aura déjà un mois. "C'est un moment important qu'on doit vivre ensemble. C'est très frustrant et douloureux", conclut-elle. 

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