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A son procès, Nordahl Lelandais s'excuse mais frustre les parties civiles

"Désolé Arthur": lors de son audition libre sur la nuit des faits mardi, Nordahl Lelandais s'est adressé directement, retenant ses larmes, au portrait posé aux pieds des proches d'Arthur Noyer, qu'il a de nouveau reconnu avoir battu à mort.

Pour la seconde journée de son procès pour meurtre, l'accusé a remonté le fil de cette nuit du 11 au 12 avril 2017 sans varier de la version donnée aux enquêteurs durant l'enquête et la reconstitution: une bagarre pour un motif futile qui aurait mal tourné sur un parking de la banlieue de Chambéry.

Alors qu'il évoque le corps du caporal Noyer gisant au sol, Nordahl Lelandais baisse les yeux, laisse passer un silence, puis déclare, très ému, de son box face au portrait du caporal apporté par la famille: "Désolé Arthur. Je sais que tu es face à moi aujourd'hui. Je dis ce qu'il s'est passé. Désolé pour ta famille qui doit être très peinée de ce qu'elle entend, mais je vous dis la vérité."

Quelques minutes plus tôt, il avait fait le récit de cette nuit fatale au militaire. "Au moment de repartir pour rentrer chez moi, j'ai vu un homme, Arthur Noyer, qui était au niveau d'un rond-point, faisant signe de m'arrêter."

Il le laisse prendre place dans sa voiture grise et le conduit à Saint-Baldoph, près de Chambéry, à sa demande, raconte Nordahl Lelandais. Puis il dit s'être arrêté sur un parking. "J'ai senti un certain énervement" du caporal.

Quelques minutes plus tard, Arthur Noyer veut finalement retourner à Chambéry pour "s'expliquer avec les personnes qui lui ont volé son téléphone".

"Moi je lui dis +ça sert à rien+", dit l'accusé, qui met la main sur le mobile resté dans l'habitacle. "En lui tendant le téléphone (...) il m'a dit +c'est toi qui l'as volé+ !", raconte Lelandais.

Puis, "il me met un coup de poing", puis un autre. "De là s'engage une bagarre, je réplique avec des coups de poing, je me bats", poursuit l'accusé. Silence dans la salle des assises de Savoie.

"Sur le moment, je ne réalise pas, mais je vois qu'il est tombé. Je m'avance vers lui pour essayer de le réveiller. Je sens qu'il n'y a plus de mouvement de sa part", raconte-t-il, affirmant avoir improvisé un massage cardiaque.

Ensuite il reprend sa version de l'instruction: il hésite, puis décide de mettre le corps dans le coffre, tourne a proximité, près d'un lieu qu'il connaissait à Saint-Baldoph, avant de prendre la route pour le massif des Bauges où il déposera le cadavre.

-"C'est du cinéma"-

En fin de journée, le président de la cour François-Xavier Manteaux a interrogé le directeur d’enquête de la section de recherche de la gendarmerie de Chambéry, mais ce dernier a bien été obligé d’admettre: "sur ce qui s’est passé à Saint-Baldoph, je ne peux pas le dire".

Pendant que l'accusé campe sur sa version, les parties civiles, peu sensibles à ses excuses, sont excédées.

"C'est du cinéma pour nous", a réagi devant la presse Bernard Boulloud, avocat de la famille Noyer.

"Malheureusement il va faire souffrir la famille (...) jusqu'au bout. On a parlé de monstre hier, il y a toujours un monstre dans le Lelandais qu'on est en train de voir aujourd'hui", a-t-il insisté.

"On peut espérer que la vérité sera à la hauteur au bout de ces quelques jours, j'ai un doute, honnêtement, j'ai un doute. Comme on a toujours dit, on n'attend rien de l'accusé, de +l'autre+, on attend tout de la justice, voilà", avait réagi plus tôt Didier Noyer, père de la victime.

Mardi matin, les audiences consacrées aux ex-femmes de la vie de l’accusé ont brossé le portrait d'un jeune homme amoureux, très actif sur le plan sexuel - y compris homosexuel - qui respecte le consentement, papillonnant entre compagnes stables et aventures sexuelles plus ou moins suivies.

Certaines ont assuré avoir eu "peur" de lui à quelques reprises. L'une d'entre elles décrit une "rupture dure et violente" assortie de menaces. "Je vais te faire bouffer le carrelage !", lui aurait-il lancé.

L'une de ses dernières compagnes, incapable de mentionner des faits concrets, et très changeante dans ses déclarations, décrit Nordahl Lelandais comme un "mythomane" dangereux qui la "terrorisait" - un témoignage marquant, mais ébranlé par la défense.

Nordahl Lelandais sera interrogé sur la nuit des faits jeudi. Verdict attendu autour du 12 mai.

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