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Des milliers de bénévoles sortent leurs jumelles pour compter les oiseaux d'eau

Hérons cendrés, canards, oies migratrices se côtoient dans des marais salants de l'île de Ré. Comme chaque année à la mi-janvier, des bénévoles les compteront dans le cadre d'un programme mondial visant à mieux connaître ces populations d'oiseaux d'eau, parfois malmenées par les activités humaines.

Des bernaches cravants, petites oies venues de Sibérie, noires et blanches, se déplacent en famille sur un plan d'eau de la réserve naturelle de Lilleau des Niges, à la pointe ouest de l'île, en cacardant.

Un peu plus loin, un courlis cendré sonde l'eau de son long bec, à la recherche de nourriture, non loin de canards souchets. Un couple de tadornes de belon, des canards bariolés, est immobile sur l'eau. Et de temps à autre, un héron cendré ou une aigrette s'envole, tandis qu'un faucon crécelle, comme suspendu dans le ciel clair et glacé de janvier, guette une proie.

Tous les oiseaux d'eau, qui dépendent de zones humides pour vivre, seront dénombrés lundi par des bénévoles, comme chaque année à la mi-janvier.

En France, plus de 1.500 ornithologues bénévoles et plus de 250 organismes et associations participent à cette opération coordonnée par l'ONG Wetlands International.

Au niveau mondial, plus de 150.000 personnes seront mobilisées à partir de samedi pendant un ou deux jours, sur 50.000 zones humides dans 180 pays, dans une fenêtre de sept jours.

A cette période de l'année, "la nature fait un arrêt sur images", "il n'y a pas de grands déplacements" migratoires, explique Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), l'association qui gère la réserve de Lilleau des Niges.

De plus, les populations de ces oiseaux d'eau sont au plus bas, la mortalité naturelle ayant fait son oeuvre et la période de chasse arrivant à sa fin. "On a potentiellement les reproducteurs de l'an prochain", poursuit Allain Bougrain-Dubourg.

- Importance des zones humides -

La métropole abrite plus de 500 zones humides où les relevés sont effectués régulièrement, dont 48 d'importance internationale pour les oiseaux d'eau, parce qu'ils abritent au moins 20.000 oiseaux d'eau ou 1% des individus d'une population. Deux cents espèces d'oiseaux y sont suivies depuis 1967.

Le comptage se fait selon un protocole précis, reproduit d'année en année, si possible avec les mêmes observateurs, pour obtenir des données les plus solides possibles.

Ce programme répond à deux objectifs, décrit Caroline Moussy, coordinatrice nationale du programme Wetlands: il permet de "déterminer les tendances et les tailles de population à l'échelle des voies de migration", mais aussi d'identifier les zones humides importantes à conserver.

Ces zones humides ont fortement régressé au cours des siècles, victimes de drainages et d'aménagements. Une prise de conscience de leur importance a toutefois eu lieu à la fin des années 1960, comme l'illustre la signature en 1971 d'un traité international sur les zones humides, la Convention de Ramsar.

La création de zones de quiétude et d'alimentation, l'interdiction de la chasse de certaines espèces ont porté leurs fruits: entre 1980 et 2021, les populations d'oiseaux en France métropolitaine ont bondi de 124% toutes espèces confondues. L'an dernier, environ 2,7 millions oiseaux d’eau ont été dénombrés, avec des effectifs stables sur les dernières décennies.

"Cela va cacher une certaine hétérogénéité" selon les espèces, précise toutefois Caroline Moussy, avec par exemple en 2021 des effectifs de grèbes en recul.

Le comptage Wetlands International "montre que les populations d'oiseaux augmentent parce qu'on a créé des réserves nationales et que ces mesures de protection fortes fonctionnent", insiste Cédric Marteau, directeur du pôle protection de la nature à la LPO.

Ces fortes croissances ne signifient pas pour autant que les populations d'oiseaux, dont certaines ont pu être mises à mal par le passé, ont retrouvé leurs niveaux d'origine, nuance-t-il.

Il existe toujours des sujets d'inquiétude. L'évolution des populations en France dépend de mesures de protection prises ailleurs sur les voies migratoires. Certaines espèces restent chassables. Et le développement d'éoliennes en mer le long des routes migratoires des oiseaux est une nouvelle source de préoccupation.

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