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Réalisée conjointement par trois professeurs d'économie de l'UCLouvain, de l'ULiège et de l'Université Saint-Louis, une étude - qui revendique son indépendance scientifique - estime que l'offre d'informations écrites par la RTBF n'est économiquement pas viable et qu'elle n'est dès lors possible que grâce aux subsides qui lui sont octroyés pour ses missions de services publics.
"Cette offre subsidiée et gratuite (représente) un risque d'éviction de l'offre privée qui pourrait être dommageable tant pour la qualité que pour la diversité de l'information", pointe l'étude présentée lundi à la presse au moment où le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles se penche sur le futur contrat de gestion la RTBF (2023-2027).
Deux options
Pour les universitaires, si l'autorité publique veut rétablir une égalité de traitement entre l'opérateur public et les éditeurs privés pour leurs contenus écrits en ligne, celle-ci n'a que deux options. Soit insérer l'offre écrite en ligne dans les missions de service public (et donc allouer aussi des subsides aux opérateurs privés qui font de l'info écrite en ligne). Soit exclure cette info écrite en ligne des missions de service public.
"Dans ce cas l'opérateur public doit adopter une démarche de marché pour son offre de contenu écrit en ligne", concluent les auteurs de l'étude, Paul Belflamme (UCL), Axel Gautier (ULiège) et Xavier Wauthy (USL). Il y a cinq ans, lors de l'élaboration du précédent contrat de gestion de la cité Reyers, la publication d'informations gratuites sur le site de la RTBF avait déjà été dénoncée par les éditeurs de presse quotidienne. Une série de limitations avaient alors été insérées au contrat de gestion de la RTBF. "Mais ce qui est désespérant, c'est que ces contraintes ne sont pas appliquées, et c'est le CSA (conseil supérieur de l'audiovisuel, ndlr) qui le dit...", a déploré le patron du groupe IPM (DH, La Libre,...), François Le Hodey, présent lundi lors de la présentation de l'étude.
Difficile transition pour la presse écrite
Depuis le développement d'internet, les éditeurs de presse quotidienne traversent une difficile transition du papier vers le numérique, en tentant d'attirer désormais leurs lecteurs vers des articles payants en ligne. "Mais comment peut-on réussir si cette offre (d'informations) est disponible de manière gratuite du fait d'un opérateur qui est subventionné?", poursuit M. Le Hodey, selon qui il s'agit là tout bonnement d'un "débat existentiel" pour la presse écrite.
Alors que leurs recettes publicitaires ont drastiquement fondu sous l'effet des Facebook et autres Google ces dernières années, les éditeurs de presse francophones devront disposer de 300 à 400.000 abonnés digitiaux d'ici deux ou trois ans s'ils veulent garder la tête hors de l'eau. Ils en comptent aujourd'hui à peine 100.000, selon M. Le Hodey.
Les éditeurs francophones, qui s'étonnent que les autorités publiques n'aient pas elles-mêmes commandité cette étude d'impact économique, espèrent que la Fédération Wallonie-Bruxelles va à présent s'emparer des conclusions de cette étude pour réétudier la place des infos écrites sur le site web de la RTBF.
"Ce que l'on doit comprendre, c'est qu'on utilise aujourd'hui l'argent du citoyen d'une telle manière que cela détruit les activités de la presse écrite", renchérit Bernard Marchant, CEO de Rossel (Le Soir, Sudinfo,...) également présent lundi lors de la présentation de cette étude.
L'association La Presse.be espère à présent pouvoir être auditionnée par les députés de la FWB à l'occasion de leurs travaux sur le futur contrat de gestion de la RTBF.