Accueil Sport

Affaire Henrotay - Van Holsbeeck: comment fonctionne le milieu des agents de joueurs? Quelles sont les dérives?

Herman Van Holsbeek a passé la nuit de jeudi à vendredi en prison. L’ancien manager d’Anderlecht est entendu dans une affaire de corruption et blanchiment d’argent. Une affaire dans laquelle l’agent de joueur Christophe Henrotay est inculpé. Nous avons ainsi voulu essayer de comprendre le rôle des agents de joueurs. Comment fonctionne ce milieu? Quelles sont ses dérives aussi? Nenad Petrovic, le patron de la fédération belge des agents de football, était l'invité de notre journaliste Olivier Schoonjans.


Olivier Schoonjans: L’affaire Henrotay - Van Holsbeeck vient d’éclater... Que leur reproche-t-on?

Nenad Petrovic: "Je ne suis pas dans le dossier mais d’après ce que la presse en a dit, il semblerait qu’il y aurait eu des soucis de rétrocommissions, qui peuvent être assimilées à une forme de corruption privée. Maintenant, tout le monde bénéficie de la présomption d’innocence."

O. S.: Cette histoire de rétrocommissions, comment ça marche ? Sauriez-vous m’expliquer ce qui s’est passé ?

N.P.: "Sur un transfert de 20 millions par exemple, il y a une petite entente pour le faire monter à 22-23. La commission de l’agent est aussi surévaluée et il va rétrocéder une partie de cette commission aux dirigeants du club A, qui a acheté, mais aussi peut-être à ceux du club B, qui a vendu. Ce sont des conditions extrêmement opaques. C’est très difficile de retracer cela."

O. S.: Plusieurs millions d’euros ont été saisis chez l’agent de joueur Christophe Henrotay. Des appartements, des voitures de luxe... On baigne dans l’argent.. Comment ça se fait?

N.P.: "Depuis un certain temps, on a vu que les droits tv avaient explosé. Ce qui explique qu’il y a de plus en plus d’argent dans le football. Auparavant, un club se finançait avec ses recettes du guichet, en vendant des maillots et des joueurs. Maintenant, le foot est devenu un foot business. Je vous rappelle que Neymar a été vendu pour 222 millions d’euros, ce qui est délirant. Il est évident qu’à partir du moment où les transferts et les salaires des joueurs explosent, le salaire ou la commission de l’agent se développe aussi. Pour les agents qui traitent des transferts internationaux, il est clair que les montants de commission ont suivi l’inflation des prix de transfert et de salaire des joueurs."

O. S.: Dans le cadre de cette affaire-ci, comme dans l’affaire qui concerne Mogi Bayat, c’est une question de petits arrangements entre amis, entre clubs et agents, avec de l’argent qu’on ne déclare pas ?

N.P.: "Cela peut faire partie de ce genre de choses. La Belgique est un petit pays où tout le monde se connaît et il est un peu plus facile de faire ce genre de choses chez nous qu’en Angleterre, où le marché est plus grand. Il y a évidemment des agents « maison » qui ont les faveurs de certains clubs. C’est lié aussi au fait qu’il n’y ait pas de législation de protection des agents. Or, cela permettrait de régler quelques problèmes. Il faut savoir qu’un joueur peut quitter son agent sur un coup de tête. Il n’y a donc aucune protection contractuelle entre un agent et son joueur. Cela amène beaucoup de dérives, à partir du moment où il y a un agent maison qui travaille pour un club. Cela favorise certaines ententes qui peuvent produire des ententes illicites."

O. S.: Christophe Henrotay fait quand même partie de votre association... Il est même vice-président. Cela fait tâche...

N.P.: "Les faits qu’on lui reproche ne sont pas avérés. Il y a une enquête qui vise des faits datants de 2015. C’est une réaction au scandale du footgate, qui a eu lieu le 10 octobre 2018. Nous existons depuis le mois de décembre et il n’y a rien qui annonçait que Monsieur Henrotay allait avoir des problèmes. Notre rôle n’est pas judiciaire. On représente les agents. Christophe est vice-président, car il est dans notre intérêt d’avoir des agents qui représentent de très grands joueurs, comme Thibaut Courtois."

O. S.: A votre avis, il y aura d’autres affaires du genre qui risquent d’éclater?

N.P.: "C’est difficile à dire, mais je crois que malheureusement oui. Le footgate est un tsunami. Il y aura des répliques, on en est qu'aux premières vagues."

À lire aussi

Sélectionné pour vous