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Vague d'indignation concernant les peines infligées dans l'affaire Sanda Dia: "La justice ne peut être rendue sous l'emprise de l'émotion"

L'invité du 7h50 de Bel RTL Matin était ce jeudi Philippe Morandini, premier président de la Cour d'appel de Mons.

La cour d'appel d'Anvers a décidé il y a deux semaines d'évoquer l'affaire Sanda Dia et de statuer elle-même sur le fond de l'affaire. Les 18 membres du cercle estudiantin Reuzegom de la KU Leuven ont été jugés coupables d'homicide involontaire, de traitement dégradant et d'infractions à la législation sur le bien-être animal. Ils ont été condamnés à entre 200 et 300 heures de travaux d'intérêt général et à 400 euros de dommages et intérêts. Les prévenus ont été acquittés de l'administration de substances nuisibles et de négligence.

Ces peines, jugées dérisoires et laxistes, ont provoqué plusieurs manifestations dans le pays ainsi que des réactions de partis politiques. Face à Antonio Solimando, Philippe Morandini, premier président de la Cour d'appel de Mons, est revenu sur ces manifestations qui dénoncent un certain laxisme de la justice. Un avis qu'il regrette : 

"Cela m'attriste, car la justice est souvent décriée, et c'est dommage", dit-il. "Les peines prononcées reflètent une certaine émotion et je la comprends, je l'ai également connue en tant que magistrat, comme dans les Affaires Dutroux et Fourniret. Seulement, le rôle du juge est spécial, il ne fait pas ce qu'il veut. Le politique vote les lois qu'il veut, tandis que le juge doit travailler dans un cadre légal et les peines qu'il prononce sont légales".

La sévérité des peines, jugées trop légères, est également au coeur des colères. "Cela pouvait être plus sévère, mais les peines sont adaptées aux types d'individu que l'on a devant soi et à la situation factuelle", explique le magistrat. "La justice ne peut pas être rendue sous l'emprise de l'émotion : quelqu'un qui punit sous l'emprise de l'émotion punit mal".

Problème de classe ? 

Parmi les colères, certains, comme le PTB, ont dénoncé le fait que les accusés venaient plutôt de familles aisées, tandis que la victime, elle, était d'origine mauritanienne. Problème de justice de classe et de racisme ? "Lorsqu'il y a des affaires comme le Qatargate qui éclatent, on ne peut pas dire qu'il y a une justice de classe. En ce qui concerne le problème racial, je suis moi-même un produit de l'intégration", explique Philippe Morandini. "Je suis petit-fils d'immigré et on veut surfer sur une certaine émotion qui n'a pas lieu d'être".

Concernant les critiques des politiques sur la justice, le magistrat tenait à remettre l'église au milieu du village. "Mon grand-père a fui le fascisme en 1922 et je trouve que cet Etat part en vrille et cela m'inquiète. La justice est là pour rendre la paix sociale et elle ne peut pas le faire toute seule. Elle doit être soutenue par les autres pouvoirs. Si les autres pouvoirs ne font que critiquer le pouvoir judiciaire, il ne tiendra pas, mais les autres pouvoirs non plus".

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