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Accent Flamand: la Flandre veut-elle suicider ses vieux ?

Luc Van Gorp, président de la Mutualité Chrétienne, déclenche suggère une option radicale pour les personnes âgées fatiguées de vivre: le suicide assisté. 

Je ne sais pas vous, mais j’ai toujours trouvé que le néerlandais était une sorte de "langue Lego". En combinant deux mots, on en crée un troisième qui exprime d’une seule traite une idée plus complexe. Exemple : l’association de leven (vie) et moeheid (fatigue) donne levensmoeheid (lassitude de l’existence). 

Cette notion est d’ailleurs pile au centre du débat public en Flandre cette semaine. Du fait d’un certain Luc Van Gorp, le président de la mutualité chrétienne, la première du pays. Ce n’est donc vraiment pas n’importe qui. 

Monsieur Van Gorp veut permettre aux plus âgés d’entre nous, qui en ont assez de vivre de mettre fin à leurs jours. Il s’agit davantage de suicide assisté que d’euthanasie, même si le résultat est identique : le cœur s’arrête de battre. Pour toujours. 

Quelles sont les conditions de l'euthanise en Belgique ? 

Pour mieux comprendre, voyons d’abord ce que recouvre l’euthanasie telle qu’elle existe déjà en Belgique. Elle est assortie de trois conditions :

  1. Elle s’adresse à des personnes capables d’en exprimer le souhait juste avant de l’obtenir. Deux médecins se penchent alors sur la question. 
  2. Elle ne peut être obtenue qu’en cas de souffrance insupportable, physique ou psychologique.
  3. Une guérison n’est plus possible.

Alors, vous allez me dire : pourquoi le patron d’une institution chrétienne plaide-t-il pour aller plus loin que l’euthanasie ? En effet, Luc Van Gorp veut mettre en place une aide à mourir pour des seniors qui ne sont pas malades, mais qui ont simplement le sentiment que c’est bon comme ça, que ça a assez duré.

Un débat qui divise 

Il s’est exprimé dans différents médias flamands. Voici ses arguments :

  • En 2050, le nombre de Belges de plus de 80 ans aura doublé et passera de 640 000 aujourd’hui à 1 200 000.
  • Notre société ne pourra pas s’occuper de ces gens en fin de vie toujours plus nombreux qui auront besoin de toujours plus de soins.
  • Il faut davantage parler de qualité de la vie plutôt que de quantité de vie. Autrement dit, pourquoi ne pas vivre moins, mais mieux
  • Et quoi qu’il en soit : de plus en plus de gens veulent pouvoir décider du moment où trop, c’est trop. Pourquoi les en empêcher ?

Seulement, voilà, la proposition de Monsieur Van Gorp a été diversement accueillie. Du côté des libéraux flamands, on déclare qu’il y a matière à discussion, sans plus. Mais dans son propre camp, le monde chrétien, le président de la mutuelle se prend une sacrée pelle. 

Sammy Mahdi, président du parti social-chrétien CD&V a exprimé son opinion : "La réponse au manque d’envie de vivre n’est pas de faire mourir les gens. La réponse que nous devons tous avoir davantage de respect pour nos grands-parents et leur consacrer plus de temps.

Okra, la grande association flamande de seniors est encore plus dure : "Il est inacceptable qu’on suggère aux gens d’en finir pour limiter les coûts pour la société.

"Ne me comprenez pas mal", rétorque Luc Van Gorp. "Pour moi, il est avant tout intolérable d’obliger quelqu’un qui veut en finir de continuer à vivre. 10% des gens ne le souhaitent tout simplement plus." Du côté francophone, le débat n’a pas encore percolé.

"La vie vaut encore la peine d’être vécue ?"

Pourtant, l’an dernier, Jacques Bredael (85 ans), ancien présentateur du journal télévisé de la RTBF, avait déclaré ceci dans "C’est pas tous les jours dimanche sur RTL" : "Quand on arrive à la fin de sa vie, on devrait pouvoir décider nous-mêmes quand ça suffit. J’ai envie de vivre pour profiter de l’existence, comme je le fais aujourd’hui. De pouvoir regarder la femme que j’aime ou regarder RTL. Est-ce que si on me prive de tout ça, la vie vaut encore la peine d’être vécue ? Non. Aujourd’hui, quand on demande l’euthanasie, ce sont deux médecins qui décident et, pour moi, c’est un problème." 

Les politiques présents ce jour-là avaient poliment répondu que ça valait un débat de société. Il n’a jamais vraiment eu lieu. Du moins, jusqu’à aujourd’hui.

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