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Plongée au coeur de "l'école des sans école's": Lucia est "triste" de voir ses copains y aller sans elle

Des parents nous ont contactés pour pointer du doigt le décret inscription. Un nouveau coefficient a fait son apparition cette année pour évaluer le niveau socio-économique de l'école fréquentée par un enfant en primaire. Si cela avait pour but de favoriser "la mixité sociale" pour le collectif de parents "Enfants non admis", c'est en réalité tout le contraire. On vous explique pourquoi.

Plusieurs parents nous ont contactés via le bouton orange Alertez-nous à propos du décret inscription en Fédération Wallonie-Bruxelles. "Après maintenant deux semaines de rentrée pour l’enseignement francophone, encore de nombreux enfants restent sans école pour leur rentrée en première secondaire. En cause : l’application de nouveau calcul d’indice socio-économique. Des parents, dont nous faisons partie, ont dû prendre les devants et créer une classe pour ces enfants oubliés : L’école des sans école's. Aucune action du gouvernement n’a encore été prise pour résoudre cette situation", écrit-on à notre rédaction. 

À Bruxelles, des parents, des grands-parents, et même des enseignants à la retraite s’organisent pour mettre sur pied une école temporaire. Nous sommes allés les rencontrer. Sur place, 4 élèves de première secondaire sont toujours en liste d’attente pour intégrer l’une des écoles de leurs choix. En attendant, ils sont inscrits à l’école à domicile… Mais suivent les cours depuis cette école temporaire. "C'est vrai que je suis très triste, car tous les matins, je vois mes copains aller dans l'école de mon choix... et moi non. Mais sinon, c'est génial ici, on s'entend tous bien. Mais c'est vrai que c'est un peu difficile des fois", confie Lucia, élève en première secondaire.

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L’apparition d’un nouveau coefficient

Ce fameux décret, qui organise l’attribution des places en première secondaire, a été modifié pour cette rentrée académique. Le collectif de parents "Enfants non admis" reproche ainsi l’ajout d’un critère supplémentaire – le coefficient 8 – dont le but est d’apporter "une meilleure mixité dans les écoles", selon le cabinet de la Ministre de l’Enseignement Caroline Désir. 

Il évalue le niveau socio-économique de l’école fréquentée par l’enfant en primaire. "La fréquentation de l’école primaire est devenue l’élément déterminant pour classer les élèves en liste d’attente. Les écoles primaires qui ont les indices socio-économiques les plus élevés sont classées systématiquement à l’arrière des files d’attente. Plus les élèves ont un indice socio-économique élevé, plus ils vont être défavorisés dans le classement des écoles. Donc les enfants sont pénalisés pour avoir fréquenté une école primaire particulière", dénonce Sandra Michiels, membre du collectif "Enfants non admis".

L’argument de la mixité sociale est bon, mais il est tout à fait inapproprié dans la situation

Si dans certaines régions, le nouveau coefficient ne pose pas souci, ailleurs, il semble créer des "aberrations" et ne "renforce en rien" la mixité sociale. "Je pense que l’argument de la mixité sociale est bon, mais il est tout à fait inapproprié dans la situation. Aujourd’hui, on n’influence aucunement la mixité, c’est-à-dire qu’on donne priorité en bloc aux élèves issus des écoles aux indices socio-économiques les plus faibles et on ne fait que déplacer en bloc des enfants. Donc les enfants qui ont fréquenté des écoles avec un indice socio-économique plus élevé ne peuvent plus entrer dans les écoles des quartiers et sont donc envoyés ailleurs", poursuit Sandra Michiels.

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Pour les parents du collectif, comme pour certains directeurs d’école, ce nouveau critère impacte fortement l’attribution des places, particulièrement dans certains quartiers du nord-ouest de Bruxelles. "Moi, je constate que j’ai à peu près 10 à 15% d’élèves en moins qui viennent de notre centre scolaire primaire. Nous faisons partie d’un centre avec enseignement maternelle, primaire et secondaire et l’enseignement primaire est à peu près à 50 mètres de chez nous. Et les seuls enfants qui ont pu avoir accès à la première commune, ce sont les élèves qui avaient déjà un frère ou une sœur inscrit chez nous. Cela n’était jamais arrivé avant…", déplore Marie-Louise Vanesse, Directrice du lycée Maria Assumpta section secondaire.

Cela a occasionné beaucoup de déception dans le quartier, comme nous le confirme la directrice : "Je reçois régulièrement des parents, des collègues aussi… à qui on demande aux enfants de faire un long trajet dans Bruxelles car ils se retrouvent parfois dans des écoles à l’autre bout de Bruxelles alors qu’ils habitent le quartier."

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Cette situation pose question dans certaines écoles, surtout quand les établissements essayent de "valoriser une continuité en tant que centre scolaire", poursuit Marie-Louise Vanesse. "Pourquoi est-ce qu’on empêche les parents qui ont envie d’inscrire les enfants dans cette vision ?"

Une vingtaine d'élèves encore en liste d'attente

Le collectif "Enfants non admis" tente de sensibiliser la ministre de l’Éducation, Caroline Désir, sur leur situation. Son cabinet nous renvoie vers la réponse de la ministre adressée au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. On peut notamment y lire : "Le décret inscription cristallisera toujours les mécontentements (…) Le nouveau dispositif s’inscrit cependant dans les mêmes équilibres que le précédent, tout en ayant revu certains paramètres afin d’améliorer la transparence des critères, de simplifier les procédures et de renforcer la mixité sociale."

"Je suis évidemment bien consciente de la détresse et de la colère que les classements peuvent engendrer pour les parents et leurs enfants qui sont actuellement en liste d’attente. Mais la situation en termes de places disponibles dans le Nord-ouest de Bruxelles n’est en rien différente des autres années", lit-on encore dans cette note. 

À la mi-septembre, une vingtaine d’élèves figurait encore sur liste d’attente, pour la grande majorité en région bruxelloise. 

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